Pour la 10e édition de Totem électrique, les compositeurs et interprètes ont fait vibrer tout un attirail d’instruments inventés le 2 juin au Studio Multimédia du Conservatoire de musique et d’art dramatique du Québec.
Un tuyau en forme de «S» perché dans un cerceau suspendu. Il est bouché à une extrémité par une sorte de membrane tendue de caoutchouc jaune. Cette surface sert de peau de tambour puisqu’une mailloche se dresse sur l’engin. L’air soufflé dans le tuyau, la tension de la membrane et les coups de mailloche sont contrôlés à distance. Nommé le Perroquet, cet instrument évoque le monde sonore d’articulation des mots cachés, des paroles imaginaires sans qu’ils doivent avoir de véritables significations.
Grosso modo, les instruments de musique utilisés lors du concert se situent quelque part entre la batterie de Guy Nadon et le clavier de Maurice Martenot combinant l’étrangeté de la première aux sonorités évasives du second. Cependant, poser des paramètres ne rend pas justice à ces engins aux traits organiques puisque chaque instrument inventé a une prestance et son éclat propre.
Lorsqu’un musicien s’installe, c’est un chef d’orchestre qui habite et se laisse habiter par son instrument. D’une part, le spectacle auditif est d’écouter la mélodie grinçante qui nous plonge dans une ambiance rappelant les univers de science-fiction ou post-apocalyptique. D’autre part, le spectacle visuel est d’observer le corps du musicien en mouvement qui semble davantage jouer avec sa conscience qu’avec son attention.
L’Orgue de sirènes m’a semblé le plus envoûtant de tous les instruments. À deux reprises, les musiciens ont joué de cet instrument qui consiste à s’asseoir à travers cinq gros klaxons par lesquels de l’air est soufflé à l’aide d’un compresseur. L’interprète joue avec l’intensité du débit d’air pour altérer le son, tout en utilisant diverses sourdines.
Au fil des ans, le directeur général et artistique Jean-François Laporte a amené la sélection de l’instrumentarium au-delà de Montréal par la collaboration avec les étudiants du Conservatoire de Turin et des universités de Huddersfield, Dalhousie et Berkeley. À mesure d’élargir les horizons de cette exploration sonore, le répertoire s’est développé de même que les instruments par les compositions. Il ne s’agit pas d’improvisation, les interprètes suivent des partitions bien écrites.
En voyant la Table de Babel, on se demande: qu’est-ce que c’est que cette créature ? Les multiples façons de manipuler cet instrument pour produire des sons sont tout aussi insoupçonnées.
À expérimenter.