Au tournant du millénaire, les messages du Dalaï-lama, la pratique du yoga ou les tentatives de Feng shui ont provoqué un regain d’intérêt pour la spiritualité orientale. Le moine bouddhiste du temple Kenkoh-ji de la ville de Yokohama au Japon, Shunmyo Masuno offre une série de trucs pour faire le ménage dans l’essai Ranger, une pratique zen paru aux Éditions Philippe Picquier en les contextualisant par rapport au zen.
«Pour quelles raisons ce livre est-il parvenu dans vos mains? Peut-être est-ce parce que vous souhaitiez ranger votre maison afin de vivre en vous sentant plus léger ? Ou bien vous vouliez en finir avec le désordre qui règne dans les pièces ? Ou encore, certains parmi vous s’intéressent peut-être tout simplement au zen, au bouddhisme», lit-on vers la fin de l’essai, lorsque la lecture est bien entamée. Cet extrait dévoile le ton de ce livre traduit du japonais qui s’adresse directement au lecteur pour l’amener à agir. Accessible à tous, étant donné que le moine considère que la recherche de la vérité ne peut s’appuyer sur les écrits et la connaissance.
D’un point de vue spirituel, la vérité est relative à la culture et le moine prend le temps de nous expliquer cette notion en particulier de même qu’une série d’autres concepts indéracinables qui nous permettent d’appréhender le Japon avec une certaine profondeur. L’idée de base est que notre logement, que ce soit un appartement ou une maison, doit être un espace pur et sacré. Il s’agit de le mettre en ordre pour libérer notre cœur des tracas du quotidien ou d’attachements pathétiques à long terme générant du stress. Shumnyo Masuno compare le chemin de la gare jusqu’à la maison à une allée d’accès au temple, suggérant de se créer un rituel discret au long de cette distance pour préparer son arrivée.
Bien qu’il décrive amplement l’ascétisme de l’existence des bonzes, le mode de vie du moine Masuno suit cette discipline sans être en retrait de notre réalité. Il cumule trois fonctions : responsable du temple, professeur d’université et architecte-paysagiste. Pour lui, l’habitat traditionnel japonais serait celui du vide. Un espace divisé par des cloisons, des piliers et des shoji avec peu ou pas de décoration superflue. Alors que la décoration intérieure des maisons occidentales se veut un condensé des goûts de leurs habitants donnant l’impression de se trouver dans un musée. Ainsi, il y a une différence de la conception du beau entre Japonais et Occidentaux.
N’empêche que le moine Masuno insiste sur le tokonoma des maisons japonaises d’autrefois, une alcôve que l’on décorait avec un kakemono ou bien une fleur, ou encore un bibelot dont le choix variait en accord avec la saison ou les fêtes. Bref, un lieu de bienvenue où s’exprimaient les goûts et la culture du maître de la maison.
Pratico-pratique
Certains enseignements s’ancrent dans la philosophie bouddhiste lorsqu’il écrit, par exemple, que la construction dans laquelle vous vivez, que ce soit un immeuble ou une maison, contient les pensées des travailleurs qui l’ont édifiée. Que si tous les charpentiers, menuisiers et autres artisans n’avaient pas collaboré, le bâtiment n’aurait pas vu le jour.
Le pendant de ce raisonnement se trouve un peu plus loin dans le livre: «Si vous conservez des choses inutiles sans les jeter, elles se retrouvent en sommeil et ne peuvent pas remplir le rôle fondamental pour lequel elles existent. Alors qu’on lui a donné vie, l’objet se retrouve dans la situation de ne pouvoir vivre cette vie».
Les conseils du moine Shumnyo Masuno pour le rangement entrecoupent ceux des environnementalistes tout en ajoutant un accent Karate Kid (1984), en référence à cette scène épique où Monsieur Miyagi apprend le karaté à Daniel-san en lui faisant peindre la palissade.
Le personnage de Monsieur Miyagi est originaire de l’île japonaise d’Okinawa.
En complément:
https://www.pieuvre.ca/2018/04/25/litterature-horreur-et-oubli-a-quebec/
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