S’il est peu probable que la Corée du Nord lance une attaque nucléaire vers les États-Unis, il existe un vieux scénario, que les derniers événements ont remis au goût du jour: une explosion dans la haute atmosphère, capable de déstabiliser les réseaux électriques. L’équivalent d’un court-circuit à l’échelle d’un continent.
On appelle ça EMP, pour electromagnetic pulse. En gros, c’est une surcharge électromagnétique d’une telle puissance qu’elle fait littéralement exploser les transformateurs électriques. En théorie, une bombe dite thermonucléaire explosant dans la haute atmosphère aurait cet impact : au temps de la guerre froide entre les États-Unis et l’Union Soviétique, c’était un scénario pris tout à fait au sérieux. Et c’est même un phénomène naturel: une grande panne d’électricité survenue au Québec en 1989 a été causée par une puissante éruption solaire — quatre fois la puissance d’une éruption normale.
Aujourd’hui, ce n’est plus juste un scénario de guerre froide ou de science-fiction. Dans le communiqué où, dimanche dernier, il annonçait fièrement avoir testé pour la première fois une bombe à hydrogène, le gouvernement nord-coréen faisait explicitement référence à cette menace:
« …une bombe thermonucléaire multifonctionnelle dotée d’un grand pouvoir de destruction que l’on peut faire exploser à grande altitude pour une puissante attaque EMP en fonction d’un objectif stratégique. »
Dans le scénario le plus optimiste, une attaque EMP provoquerait des pannes d’électricité pendant quelques heures, comme ce fut le cas au Québec. Dans le scénario du pire, il faut imaginer des dommages aux réseaux qui mettent des mois à être réparés. Dans l’intervalle, est affecté tout ce qui repose sur une alimentation en électricité: lumières, communications, approvisionnement en eau potable, les systèmes de réfrigération de la nourriture, Internet, etc.
Selon l’auteur canadien Anthony Furey, auteur du livre Pulse Attack: The Real Story Behind The Secret Weapon That Can Destroy North America, une partie de l’infrastructure des États-Unis — en particulier l’infrastructure militaire — fut renforcée jadis dans l’hypothèse d’une telle attaque. Mais la majeure partie de l’infrastructure « civile » serait toujours vulnérable, en particulier celle de la côte Est, selon le consultant financier Dennis Santiago.
« Des régions métropolitaines entières et des centres économiques s’effondreront. Lorsque nous en sortirons, les États-Unis ne seront plus le même pays que nous connaissons aujourd’hui. »
Faut-il vraiment craindre une telle attaque? Une dictature isolationniste comme la Corée du Nord préférerait une « attaque sur le terrain spectaculaire et directe », plutôt qu’une attaque EMP aux conséquences difficiles à prévoir, écrivait le physicien Yousaf M. Butt. Mais il écrivait ces lignes… en 2010.