Avec la chaleur estivale, la baignade s’impose. L’exposition Maison des ombres multiples de l’artiste Olafur Eliasson présentée au Musée d’art contemporain de Montréal (MAC) jusqu’au 9 octobre 2017 propose une réflexion sur notre rapport à l’eau pour tous les âges, idéale par temps pluvieux.
Le tout commence à l’intérieur de la petite salle obscure avant l’entrée de la salle d’exposition avec l’œuvre Big Bang Fountain 2014. Un jet d’eau y jaillit de façon à projeter une masse au contour aléatoire dans l’air. Prenant place autour du cylindre de la fontaine, les visiteurs reçoivent une impression fixe de cette forme par une lumière stroboscopique qui s’allume à moyen terme. Autrement, le mouvement de l’eau serait continu et non fixe. Cette installation n’est pas sans rappeler la photographie.
Errant dans la succession de salles d’exposition, le visiteur est invité à suivre un parcours optique. Il s’agit d’une forme de transe perceptuelle. Si à première vue les pièces semblent vides puisqu’on s’attend d’un musée d’y défiler devant un alignement d’œuvres d’art ou d’y contourner des sculptures déposées les unes à côté des autres, l’artiste nous guide plutôt à l’orée du lieu d’exposition mettant le « cadre » en avant-plan d’une façon épurée au point de frôler la transparence.
L’artiste joue avec un principe de vase communicant ou d’alignement ou encore de superposition. Telle la fontaine initiale, l’image qui s’imprègne en nous a lieu puisque la lumière extérieure nous apparaît.
Dans la première salle, il nous présente la lumière dont cet anneau de boules colorées en référence au fameux prisme découpant le jet lumineux en couleurs de l’arc-en-ciel. Ensuite, le visiteur est invité à entrer dans l’œuvre, à intégrer sa silhouette devant les projecteurs. L’effet cinétique produit rappelle le film Pas de deux (1968) réalisé par Norman McLaren. Bref, on ondule devant les écrans et notre silhouette se saccade comme une onde ou une aura.
L’effet optique n’est pas produit par la chimie des couleurs comme dans les Gongs de Claude Tousignant ou par des schémas linéaires impossibles comme dans les gravures de Maurits Cornelis Escher. Bien que l’artiste emploie les mêmes ingrédients du registre de l’illusion comme la symétrie, il nous propose plutôt une superposition méticuleuse s’adressant à la conscience des visiteurs sensibles ou avisés. N’empêche que ce type d’exposition a beaucoup de succès auprès des enfants qui participent allègrement aux jeux d’ombres.
Quelque part, l’artiste arrive peut-être à éveiller notre sens de la vision qui s’est endormi au même moment que la curiosité de notre jeunesse.
Aquatique
À la fin, l’artiste revient avec l’élément « eau » avec l’œuvre Beauty 1993, c’est-à-dire à une installation qui met en valeur l’aspect organique de cette source de vie. Serait-ce ce qu’on redécouvre lorsqu’on bouge devant les écrans? L’aspect aqueux de notre corps se référant aux 60 % d’eau qui nous constituent.
Ainsi, la boucle se boucle. Le visiteur peut s’amuser à reconstituer le casse-tête pièce par pièce, installation par installation, de façon intelligible. À la manière que les touristes étaient invités à le faire au musée du sculpteur Ásmundur Sveinsson en Islande avec l’exposition de l’artiste Elín Hansdóttir l’été dernier.
D’ailleurs, le rapport à l’espace présenté dans cette exposition ne peut passer sous silence le parcours de l’artiste qui a grandi au Danemark et en Islande, pour finalement baser son studio dans l’agglomération étendue et reconstruite de la capitale Berlin.
Les rapports territoriaux qu’ont entretenus ces trois pays tout au long de leur histoire fournissent des clés à la compréhension de la sensibilité de l’artiste et de la démarche artistique qui en découle.
En parallèle de l’exposition Maison des ombres multiples, ne pas manquer l’œuvre The Sleepers (1992) de l’artiste Bill Viola et l’œuvre Katimakainnarivugut (2017) de l’artiste Geronimo Inutiq dans les expositions adjacentes au MAC.