La Guerre froide est finie. Mais l’est-elle vraiment? En Amérique du Sud, les loyautés datant des belles années de l’URSS et des guérillas communistes pèsent encore de tout leur poids sur le destin d’anciens commandos. À croire qu’on est encore bien loin de La fin de l’histoire, écrit l’auteur Luis Sepulveda.
Juan Belmonte pensait en avoir fini avec la guerre. Ancien tireur d’élite formé par l’Union soviétique pour porter le flambeau communiste en Amérique du Sud, il espère couler des jours tranquilles auprès de sa compagne, longuement torturée par le régime de Pinochet, au Chili, et rendue muette dans les geôles entre autres opérées par d’anciens nazis et cosaques.
Machinations, espoirs sociaux et politiques dont la timide flamme vacille en fonction des soubresauts de l’histoire, ce roman s’étend sur autant de continents que de décennies. Avec, à la clé, un espoir de dénouement pour nos personnages, dont les épaules croulent sous le poids des événements.
Avec ce nouveau roman, Sepulveda permet aux lecteurs de retrouver le personnage de Belmonte, un homme tourmenté par son passé, et qui sait fort probablement que même si la présente histoire se termine bien, il ne sera jamais vraiment libéré de sa colère envers lui-même. Pas plus qu’il ne pourra surmonter sa désillusion idéologique.
Il faut admettre que la connexion entre les groupes révolutionnaires sud-américains et la Russie soviétique, au plus fort de la Guerre froide, est passablement méconnue dans les cours d’histoire occidentale. On pourrait arguer qu’il s’agit des résultats d’un biais médiatique et historique occidento-centriste, mais le fait est que Sepulveda nous entraîne dans un monde franchement intéressant où le passé n’est pas aussi loin qu’on pourrait le croire. Surtout lorsqu’il est question de la transformation des moeurs politiques des pires scélérats et monstres des dernières décennies. Après tout, s’il est terrible de constater que les anciens responsables du régime nazi ont fui l’Allemagne pour trouver refuge en Amérique du Sud, il est encore plus désolant de voir que ces criminels ont repris du service, parfois pendant des décennies, en exécutant les basses oeuvres des dictateurs du continent.
Malheureusement, la façon dont Sepulveda présente ses personnages et le déroulement de son histoire laisse le lecteur quelque peu froid. La faute, peut-être, à la traduction de l’espagnol vers le français, mais on éprouve de la difficulté à se lier aux personnages et à s’intéresser aux péripéties. Et le fait que l’histoire se termine un peu en queue de poisson n’est pas particulièrement avantageux non plus.
Pour les lecteurs connaissant l’histoire géopolitique de l’Amérique du Sud, La fin de l’histoire pourrait représenter un ajout fort intéressant à une bibliothèque. Pour les autres, un peu de rattrapage historique est potentiellement nécessaire.
La fin de l’histoire, de Luis Sepulveda, publié chez Métailié noir, 191 pages