Non, la copie de textes, durant le Moyen-Âge, n’était pas uniquement réservée à des moines copistes portant la robe de bure et s’échinant dans des monastères froids et poussiéreux – avec ou sans bibliothèque secrète; une nouvelle étude révèle que des femmes ont elles aussi contribué à la préservation et la diffusion du savoir, entre le 9e et le 17e siècle.
De l’avis de chercheurs de l’Université de Bergen, en Norvège, au moins 1,1% des manuscrits médiévaux datant de cette période auraient ainsi été copiés par des femmes, avec un total dépassant sans doute les 110 000 documents. Cela porte à croire qu’environ 8000 de ces textes existeraient toujours, aujourd’hui.
Il ne s’agit pas des premiers travaux de recherche sur l’implication des femmes dans ce processus aussi long que complexe et essentiel, mais les précédentes études se concentraient sur des régions particulières, un petit nombre de textes, ou encore une période de temps limitée, indique-t-on.
Dans le cadre de la plus récente découverte, les chercheurs se sont intéressés aux colophons, de courts extraits se trouvant à la fin de documents manuscrits qui fournissent de l’information telle que le nom du scribe, la personne qui a commandé le manuscrit, le lieu et la date de production, ou encore, à l’occasion, des réflexions personnelles.
Un total de 23 774 colophons ont ainsi été examinés, dans plusieurs collections muséales et institutionnelles.
Pour déterminer si l’auteur de la copie était une femme, les scientifiques ouvraient l’oeil pour détecter des termes autoréférentiels, ou encore des noms féminins.
Les chercheurs n’ont examiné que des colophons où le genre du scribe était définitivement identifiable, ce qui a mené à 254 de ces extraits liés à des femmes. On a aussi mis de côté les documents ambigus, entre autres. Au total, on estime à au moins 1,1% le nombre de scribes femmes.
Toujours selon l’étude, la proportion de contributions féminines est largement demeurée constante au fil du temps, entre l’an 800 et 1400, avant de laisser place à une augmentation marquée du côté des documents en langues locales, c’est-à-dire un autre dialecte que le latin.
Au total, donc, au moins 110 000 textes auraient été copiés par des femmes durant le Moyen-Âge, et 8000 d’entre eux auraient survécu au passage du temps. Bien entendu, écrivent les auteurs de l’étude, il est possible que la contribution des femmes soit encore plus importante, mais qu’elle ne soit pas clairement identifiable.
On en sait encore peu sur le contexte sociopolitique et économique qui a permis à des femmes de s’adonnent à la copie de manuscrits, déplorent les chercheurs. Et, par extension, on ignore encore bien des choses sur la contribution de ces autrices à la littératie médiévale.