Malgré sa réputation, la compagnie A24 est sur une pente descendante depuis un moment, hormis quelques exceptions. Avec ce mitigé Death of a Unicorn, on semble en être rendus à adapter sur la longueur des prémisses qui, au mieux, auraient seulement mérité le traitement du court-métrage, menant hélas les spectateurs dans un certain état d’ennui.
Alex Scharfman est d’abord et avant tout producteur. Ceci expliquerait peut-être comment il en est finalement venu à se donner le champ libre pour écrire et réaliser son premier long-métrage, mais aussi de se permettre une distribution aussi flamboyante. Celle-là même qui représentera en fait l’intérêt principal de survivre à son film qui n’a que bien peu à dire et montrer, malgré ses belles promesses de départ, mais qui tourne à vide pendant près de deux heures.
Ainsi, ce long-métrage semble avoir été créé pour les spectateurs intoxiqués ou dans un désir malhonnête et forcé de devenir culte; cela prend déjà un moment pour en arriver à l’élément déclencheur du titre. De quoi vous donner une idée du surplace qui se poursuit ensuite.
Dommage qu’une fois la fameuse mort de la licorne passée, le film ne sait jamais ce qu’il veut être, en plus de cruellement sous-développer son histoire, mais aussi sa mythologie. Disons qu’il faut plus qu’une recherche Google et quelques vidéos sur Youtube pour démontrer qu’on a assez de jus pour bien faire vivre un univers à soi. Ou, à l’inverse, ne pas insister autant si on se montrera en parallèle si peu intéressé par tout ce qui concerne lesdites créatures.
Ne vous attendez pas à en savoir plus sur les apparitions dans le ciel ou les propriétés magiques de la corne, souvent utilisées comme autant d’excuses pour faire progresser l’histoire vers où l’on en a envie, ou encore pour un gag rapide.
Surtout que cette créature mythique n’est évidemment qu’un prétexte pour dévoiler des thématiques plus importantes, mettant à l’épreuve les véritables visages de la nature humaine.
Relation tendre quoique mi-amère père-fille? Film de deuil sur la mort de la mère? Comédie absurde? Satire du capitalisme? Slasher impromptu particulièrement sanglant?
Le film aimerait être un peu tout cela, et plus, sans jamais parvenir à s’avérer réellement satisfaisant dans aucune de ces catégories. Même sa critique de l’égocentrisme opportuniste des plus nantis s’avère mollassonne.
Prenant place dans les magnifiques paysages de la Hongrie, on tire encore moins parti des panoramas que dans Cuckoo, avec les somptueuses Alpes allemandes. Ce même si les images soignées sont une gracieuseté du talentueux, mais trop rare Larry Fong.
Pourtant, alors que le film ne semble jamais lever ni trouver son rythme, un plaisir demeure néanmoins: celui des acteurs. Comme mentionné plus tôt, on y a assemblé des comédiens et comédiennes au talent indéniable et ceux-ci agissent un peu en roue libre puisque laissés à eux-mêmes dans un terrain de jeu qui manque de direction.
On ressent alors de l’amusement par rapport à ces performances et lors de plusieurs répliques qui font mouche. Comment en être autrement en savourant les simagrées d’un Will Poulter complètement éclaté ou de finalement renouer avec la majestueuse Téa Leoni au grand écran après plus de quatorze ans?
Richard E. Grant continue de donner tout ce qu’il a dans un rôle qui n’a pas peur de visiter différents extrêmes, Anthony Carrigan est aussi amusant que quand on l’a découvert dans la télésérie Barry, alors que Jessica Hynes, Sunita Mani et Steve Park (parfois crédité sous le prénom Stephen, chez Wes Anderson notamment) susciteront également quelques rires.
Pour ce qui est de Paul Rudd, reprenant un peu son mode Ant-Man sans les grosses cascades et l’action, et Jenna Ortega, ils forment un tandem attachant, ayant également collaboré à titre de producteurs exécutifs au projet, aux côtés aussi de nul autre qu’Ari Aster, réalisateur des inoubliables Hereditary, Beau is Afraid et évidemment Midsommar.
On regrette toutefois que la majorité du film repose sur le cliché agaçant de la jeune ado que personne ne prend au sérieux et que personne ne veut écouter. Un peu à l’instar de ces morts qui finissent par toutes se ressembler ou suivre le même procédé, y apportant de la redondance plutôt que de la surprise ou de la créativité.
Plusieurs années après le sacre aux Oscars d’Everything Everywhere All At Once, les films de A24 font encore l’événement. Impossible de ne pas être intrigué par une proposition telle que Death of a Unicorn. Sauf qu’à force d’offrir des films décevants, bien que n’étant pas dénués d’intérêt, voilà une bannière qui, à l’instar de ce qui est raconté dans le film qui nous intéresse, met considérablement son commerce, et du même coup sa magie, en péril.
5/10
Death of a Unicorn prend l’affiche en salle ce vendredi 28 mars.