Les ancêtres des peuples qui allaient plus tard former l’Europe seraient venus, il y a 5000 ans, de ce qui est aujourd’hui l’Ukraine. La génétique règle du coup une énigme sur un peuple dont on sait très peu de choses, appelé Yamna, et sur l’expansion des langues appelées indo-européennes.
Lorsqu’il est question du peuplement de l’Europe par l’Homo sapiens, les archéologues et les paléontologues identifient trois vagues principales: les chasseurs-cueilleurs d’il y a environ 45 000 ans, qui vont plus tard supplanter les Néandertaliens; les premiers fermiers venus du Moyen-Orient il y a 9000 ans, dont le mode de vie va supplanter celui des chasseurs-cueilleurs; et cette mystérieuse troisième vague, venue des steppes. On la connaît par ses pratiques funéraires, qui apparaissent, dans des sites archéologiques d’il y a 5300 ans, puis se répandent dans toute l’Europe au cours des deux millénaires suivants.
Or, si les archéologues traçaient bel et bien l’origine de cette troisième vague au nord de la Mer Noire, là où est aujourd’hui l’Ukraine, il a fallu la génétique pour confirmer qu’il s’agit d’un mélange de deux populations qui habitaient bel et bien cette région il y a environ 5000 ans. Une équipe dirigée par Iosif Lazaridis, de l’Université Harvard, a passé une dizaine d’années à rassembler l’ADN de plus de 400 individus ayant vécu il y a 4000 à 8400 ans, dans l’espoir de retrouver l’origine de cette culture Yamna.
Toujours des mystères
Ce que la génétique ne peut toutefois pas révéler, c’est pourquoi ils ont migré et ce qui leur a donné un « avantage » tel qu’ils ont laissé des descendants un peu partout dans l’Europe d’aujourd’hui. L’usage de chariots sur roues tirés par des chevaux était certainement une technologie importante, qui permettait de voyager plus loin et plus vite, mais elle n’explique pas l’expansion à elle seule. Au fil des décennies, des archéologues ont évidemment spéculé sur la possibilité qu’ils aient été des guerriers qui ont conquis ces territoires par la force, mais les traces archéologiques ne concordent pas.
Chose certaine, ils ont contribué à autre chose, qui laisse encore des traces aujourd’hui: le fait que des milliards de personnes, de l’Atlantique jusqu’en Inde, parlent des langues qui ont une origine commune. Toutes les langues appelées indo-européennes sont en effet des descendantes de l’époque où a eu lieu cette expansion, et il est bien possible que l’origine soit cette culture Yamna. Le travail de ces chercheurs fait l’objet de deux études parues dans la revue Nature.