Environ cinq ans après sa création, d’abord sous le nom de Colibri, l’initiative Envoi Québec franchit le cap des deux millions de colis expédiés, y compris près de 150 000 à l’aide de transporteurs carboneutres.
Ce programme, chapeauté par le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD), s’appuie ainsi sur un programme initialement lancé par l’administration Plante, à Montréal, afin de faciliter le transport des biens et ainsi réduire « le trafic, la pollution, améliorer la circulation des colis sur le dernier kilomètre », mentionne Damien Silès, président-directeur général du CQCD.
« Nous nous sommes associés avec la Ville de Montréal, parce qu’au-delà de la mise en place de tout cela, l’idée était de trouver des clients, et donc des utilisateurs », indique-t-il dans le cadre d’une entrevue accordée à Pieuvre.
L’idée consiste à faire affaire avec différents transporteurs – 23, pour l’instant –, histoire de négocier des prix de gros pour le transport d’articles achetés en ligne, une pratique qui prend de l’ampleur de façon régulière depuis l’arrivée du web pour tous, il y a 30 ans, mais qui s’est développée de façon exponentielle lors de l’éclosion de la pandémie.
« C’est un peu comme Trivago, lorsque vous allez en vacances », évoque M. Silès, en parlant de la plateforme permettant de comparer divers hôtels, agences de location de voiture, transporteurs aériens, etc.
Sur les 23 transporteurs intégrés au sein d’Envoi Québec, « neuf sont québécois », précise le PDG du Conseil. Dans la longue liste de joueurs, on retrouve notamment Air Canada Cargo, Purolator, Postes Canada, DHL, mais aussi le carboneutre Courant+, Canpar, DHL, etc.
« On a négocié des prix intéressants; en allant sur cette plateforme, nos commerçants ont la possibilité d’avoir un coût [avantageux], et lorsque cela est possible, d’avoir une option de transport décarbonée. »
Pour l’instant, ce sont quelque 3300 entreprises qui sont inscrites gratuitement au service, affirme le CQCD. De l’avis de M. Silès, toutefois, il ne faut pas brûler les étapes lorsque vient le temps de faire gonfler les rangs des utilisateurs d’Envoi Québec, notamment en raison de l’absence, dans plusieurs régions du Québec, d’options de livraison carboneutres.
« Notre plus grand défi est géographique; il est difficile, lorsque vous êtes commerçant en région éloignée, d’avoir le réseau que peut avoir Postes Canada. Le Québec, c’est cinq fois la taille de la France, c’est gigantesque! », souligne Damien Silès, qui martèle l’ampleur des obstacles liés au gigantisme du territoire.
« Cela ne sert à rien d’avoir des dizaines et des dizaines de milliers de clients, mais que vous ne soyez pas capable [d’offrir le service de livraison]. »
Améliorer les conditions de travail
Dans le contexte de ce regroupement d’une vingtaine de transporteurs, impossible de ne pas évoquer la question des conditions de travail des employés de ces entreprises. On ne compte plus les reportages sur ces travailleurs payés au nombre de colis livrés, parfois forcés d’utiliser des bouteilles en plastique pour se soulager, et qui peuvent travailler jusqu’à très tard, le soir, afin de compléter leur tournée.
Au bout du fil, M. Silès affirme que le CQCD « est très conscient de ces enjeux », tout en soulignant que le changement de paradigme, en vertu duquel les consommateurs québécois achètent beaucoup plus d’articles en ligne, vient renforcer les exigences des clients.
Comme ceux-ci réclament une livraison toujours plus rapide (et moins chère), cela se répercute sur les conditions de travail, indique le président-directeur général.
« Si vous voulez être performants, et qu’à côté de cela, vous avez des monstres capables de vous envoyer votre colis en une journée, on s’entend que vous pédalez sec lorsque vous êtes un petit transporteur ou un petit commerçant. Cela demande une force d’action compliquée. C’est du cas par cas, et nous travaillons de plus en plus avec des entreprises québécoises, et nous faisons le maximum pour être capables d’éviter ce type de problèmes », explique M. Silès.