S’il y a longtemps qu’on parle de l’émergence des compagnies privées dans l’exploration spatiale, on ne leur a jamais attribué autant de premières qu’en 2024.
La plus visible aura été, en septembre, cette première « sortie » dans l’espace de civils, à bord d’une capsule mise en orbite par la compagnie SpaceX. « Sortie » étant un terme tout relatif, puisque le milliardaire Jared Diamond — qui a co-financé cette mission — et l’ingénieure Sarah Gilles ont, l’un après l’autre, gardé les deux pieds fermement dans la capsule, se contentant de sortir la tête et le torse à l’extérieur. Mais ça a donné pour la postérité des images des deux premiers astronautes à mettre le nez « dehors » sans être des astronautes formés par une des agences spatiales gouvernementales.
Une mission beaucoup plus audacieuse aura été cette sonde Odysseus qui s’est posée sur la Lune le 22 février, conçue par la firme Intuitive Machines, au Texas. Bien qu’elle se soit en réalité posée sur le côté, limitant le signal qu’elle pouvait renvoyer vers la Terre, c’était, là encore, la première fois qu’un engin s’étant posé à peu près correctement sur la Lune provenait d’une compagnie privée et non d’une agence gouvernementale (Union soviétique, États-Unis, Chine, Inde et Japon). Deux autres sondes privées, en 2019 et 2022, s’étaient écrasées. Une deuxième d’Intuitive Machines devrait normalement suivre en 2025.
SpaceX a par ailleurs fait parler d’elle pour sa fusée de prochaine génération, appelée Super Heavy, qu’elle développe en vue de missions vers la Lune et Mars. L’image de 2024 qui restera dans les annales est cette « récupération » de la fusée par les bras mécaniques d’une tour de lancement, lors de son atterrissage. En revanche, l’épisode dont son concurrent Boeing se serait bien passé est ce duo d’astronautes qui se sont rendus sur la station spatiale à bord de la première capsule Starliner de Boeing et qui ont dû en revenir à bord d’une capsule de SpaceX, en raison de problèmes techniques indépendants de leur volonté.
Et 2025 pourrait être profitable au secteur privé, du moins aux États-Unis: le milliardaire Jared Isaacson pourrait devenir le prochain patron de la NASA, selon une annonce faite par Donald Trump le 4 décembre. Et il y a bien sûr Elon Musk, dont l’omniprésence dans l’entourage du futur président Trump pourrait contribuer à ce que les éventuelles coupes aux budgets gouvernementaux n’aient pas un impact négatif sur les bonnes affaires de SpaceX.
Parce que l’expression « privatisation de l’espace » ne doit pas faire oublier qu’en 2024, le gros des revenus de ces compagnies, d’Intuitive Machines à SpaceX en passant par Blue Origin de Jeff Bezos, provenait encore de contrats avec le gouvernement — que ce soit la NASA ou l’armée. Et ce sera encore le cas en 2025.