La situation est « extrêmement difficile » à Gaza, mais aussi au Liban et en Cisjordanie, déplore Joseph Hazboun, directeur régional du bureau de la CNEWA, l’Association catholique d’aide à l’Orient, à Jérusalem. Plus d’un mois après le triste anniversaire de l’attaque du Hamas contre Israël, qui a relancé la guerre dans la région, et alors que Tsahal multiplie les bombardements et les incursions au Liban, les besoins sont toujours plus criants lorsque vient le temps d’aider les populations civiles.
« Israël a ciblé des camps de réfugiés, ce qui a rendu la vie des gens déplacés là-bas extrêmement complexe », déplore M. Hazboun, dans une entrevue téléphonique accordée à Pieuvre.ca. « Par ailleurs, l’escalade au sud du Liban a mené à un plus grand nombre de résidents d’Israël qui deviennent des cibles lors des tirs de roquettes du Hezbollah. »
« Cela fait plus d’un an que la guerre fait rage; les difficultés économiques de la population civile ont des impacts criants », a poursuivi le responsable, avant d’ajouter que quelque « 4000 familles travaillant dans le secteur du tourisme à Jérusalem, ou ailleurs en Israël, sont sans salaire depuis plus d’un an ».
Logements sans électricité, civils faisant la queue pour quêter de l’argent afin d’acheter du pain… ces scènes de misère ne sont pas limitées aux régions où Israël dit bombarder le Hamas ou le Hezbollah, mais tendent à se généraliser devant le conflit qui s’envenime et s’enlise.
« Les paroisses de la région ont reçu un nombre de demandes d’aide qui dépasse tout ce qu’elles ont déjà vu, auparavant », déplore également M. Hazboun, qui précise que « l’aide réclamée va bien au-delà de ce qu’il est possible de faire avec les moyens disponibles ».
Que faire, pour aider tous ces gens dans le besoin? « Ah! », s’exclame M. Hazboun. « Il nous faudrait des millions de dollars! »
« Pour être honnête, la majeure partie de l’attention des agences d’aide est dédiée à Gaza. Mais ce que nous pouvons faire là-bas est limité, en raison du très petit nombre de marchandises et de matériaux qui peuvent entrer sur le territoire, en raison des restrictions imposées par Israël. Il y a donc très peu d’attention portée à la Cisjordanie et à la région de Bethléem », poursuit encore le directeur régional du bureau de la CNEWA à Jérusalem, qui réclame « plus de financement afin de mettre en place des programmes comme des démarches visant à offrir du travail et de l’argent aux citoyens ».
« Il s’agit de permettre aux gens de travailler et de gagner un salaire sur une base quotidienne, histoire de vivre dans la dignité, plutôt que de simplement recevoir une aide financière. »
La reprise des combats a aussi fait en sorte que plusieurs étudiants d’universités, incapables de payer leurs frais de scolarité, ont dû abandonner leurs cours, déplore M. Hazboun. « Cela affecte vraiment l’ensemble de la société… les besoins sont immenses. Ils vont au-delà des capacités normales du secteur des organismes caritatifs », dit-il.
Un danger bien présent
Par ailleurs, alors que des bombes semblent avoir visé des journalistes et des travailleurs d’organisations humanitaires, sur le terrain, alors que le personnel de la CNEWA est appelé à se déplacer dans plusieurs régions pour offrir son aide, les conditions semblent relativement sécuritaire, assure M. Hazboun.
« Nous, les membres de la mission pontificale, pouvons nous déplacer sans trop de problèmes. Mais nous avons aussi évité les zones où il y a des risques, pour que nous puissions assurer et maintenir la sécurité des membres de notre équipe. Ainsi, nous n’avons pas été à Gaza; nous ne sommes pas en mesure de nous y rendre depuis plus d’un an. Mais à Gaza, aucun endroit n’est sécuritaire. Même nos communautés, avec nos églises, ont été prises pour cible à plusieurs reprises. »
Joseph Hazboun y va aussi d’une énumération de nombreux endroits, pourtant protégés par le droit international, qui ont été bombardés par Israël: « Des écoles, publiques, comme privées; des tentes où les civils s’étaient réfugiés… »
« À Gaza, aucun endroit n’est à l’abri des bombes. »
– Joseph Hazboun, directeur régional du bureau de la CNEWA à Jérusalem
Et la paix, dans tout ça? « C’est du vent », lance tout de go M. Hazboun, qui rejette l’idée qu’un cessez-le-feu, évoqué à plusieurs reprises depuis plus d’un an, puisse être conclu dans un futur proche. « Je crois qu’Israël a un plan pour Gaza », notamment une recolonisation de la bande de Gaza avec des Israéliens.
« Ce qui est vraiment triste, là-dedans, c’est que des gens innocents en paient le prix », a déclaré M. Hazboun.
Ce dernier espère que Donald Trump, nouvellement élu président des États-Unis, aidera à faire cesser la guerre. En Israël, toutefois, le gouvernement d’extrême droite au pouvoir s’attend plutôt à ce que le prochain chef d’État américain se range entièrement derrière l’État hébreu.