La chance sourit-elle aux « deuxièmes » oeuvres? Song 2, de Blur… The Empire Strikes Back… la deuxième symphonie de Rachmaninov? Oui, cette suite logique est tirée par les cheveux, mais force est d’admettre que l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) a de nouveau démontré tout son talent, la semaine dernière, lors de la présentation de ce joyau du maître russe.
Place au lyrisme et au romantisme slave, donc… Mais avant de se laisser emporter par cette tristesse qui semble inhérente à une bonne partie de la musique classique russe, il fallait un peu de musique contemporaine. Dont acte: toujours en compagnie de l’orchestre, bien sûr, l’organiste Olivier Latry, veste brillante à l’appui, a interprété une pièce inédite: la Sinfonia concertante pour orgue et orchestre, composée par Esa-Pekka Salonen.
Dans cette aventure sonore d’une trentaine de minutes, l’orgue et l’orchestre se sont ainsi mis à se répondre, tour à tour, alors que l’on pouvait aisément imaginer un groupe d’explorateurs tenter de faire son chemin à travers une forêt. Une forêt sombre, où quelque chose de sinistre semble se tramer…
À travers ces notes funestes et funèbres, des forces s’affrontent; l’ouverture lente, enveloppante, quasiment pastorale n’aura donc pas fait long feu. De fait, les noms des mouvements sont indicatifs d’autant de thèmes gagnant en intensité: aux pavanes et bourdons succéderont les variations et chant funèbre, puis le montage fantôme. De quoi donner le ton…
Mais ce fameux ton sera surtout donné par cette Symphonie no 2 en mi mineur de Rachmaninov. Entre ces cordes et ces cuivres à gogo, l’OSM, sous la direction du chef Osmo Vänska, a plongé dans ce drame puissant, pénétrant, déchirant, voire violent.
Dans de grandes étendues paisibles, idéales pour laisser parler notre coeur, les sentiments et les émotions ont pu virevolter en douceur, avant de repartir au galop sous les coups d’archet des violonistes et autres violoncellistes.
Et donc, cet orchestre a affiché sa véritable nature, celle d’une machine bien huilée parfois lancée à toute vitesse; le public est alors enveloppé par une douce chaleur, par l’intensité des cordes et des cuivres.
Impossible de s’y tromper: cette symphonie de Rachmaninov est clairement une oeuvre complète. Une pièce frondeuse, magnifique, qui respecte certes les thèmes du genre, mais qui n’a pas non plus peur d’innover, de repousser un tant soit peu les limites de l’art. Et entre les mains des musiciens de l’OSM, sous la direction du chef Vänska, l’oeuvre a semblé prendre vie. Comme si la création échappait aux mains de ses interprètes pour devenir quelque chose de plus grand, d’immortel.