Il y a collection permanente et collection permanente: afin de jeter un nouvel (ou parfois, un premier) éclairage sur ses acquisitions des dernières années, mais aussi sur le processus qui guide de tels ajouts, le Musée des Beaux-Arts de Montréal (MBAM) a pris le taureau par les cornes. Non seulement expose-t-on 80 oeuvres diverses, mais le public a droit à une façon de les présenter aussi originale que rafraîchissante.
Le titre de cette exposition, Deux par deux rassemblés, n’y est pas pour rien. Non, il ne s’agit pas des oeuvres personnelles de l’artiste Pierre Lapointe, mais plutôt d’un mariage entre diverses oeuvres, généralement par paires. Ces mariages n’ont pas été célébrés autour d’une période précise de l’histoire de l’art, ou encore d’un style pictural ou sculptural précise, mais plutôt en fonction d’un thème relativement commun entre les oeuvres ainsi jumelées.
Et force est d’admettre que pour cette exposition, agir de la sorte permet de vraiment sortir le spectateur du cadre précis en vertu duquel il parcourt généralement les galeries du musée. Ces jumelages sont bien souvent autant de surprises et d’occasions de réfléchir. Pourquoi, ainsi, a-t-on combiné une photo imprimée de bouteilles en verre et des artéfacts romains vieux de plusieurs millénaires? Pourquoi mêle-t-on des autoportraits de Rembrandt à une sculpture d’un artiste contemporain dont l’oeuvre n’a que quelques années?
Voir les oeuvres, voir l’art autrement: voilà sans doute la volonté des commissaires du MBAM, et le résultat est à la hauteur des attentes. Deux par deux rassemblés est une exposition étonnante, parfois amusante, quelques fois dérangeante (mais dans le bon sens du terme)…
On doit reconnaître qu’il aurait probablement été complexe de trouver suffisamment de prétextes ou de thèmes pour présenter toutes ces oeuvres séparémment. Ou, peut-être, aurait-on choisi quelque chose de plus conventionnel, comme des ajouts à la fantastique exposition Vice, vertu, désir, folie pour certaines pièces. Mais que faire, alors, de cette gigantesque pièce sculptée dans une vertèbre de baleine? Et de ce vase grec magnifiquement conservé qui a traversé les millénaires? Ou encore de ces dizaines d’ampoules accrochées au mur?
Deux par deux rassemblés est un excellent exemple d’une sorte de « démocratisation » de l’art, d’une façon de sortir les visiteurs d’une certaine zone de confort. On ne saurait trop recommander d’aller y faire un tour, d’autant plus que certaines oeuvres feront l’objet d’une rotation d’ici le 5 octobre, date de fin de l’exposition. Une autre raison, assurément, de ne pas craindre la récidive.