Il y a quelque chose d’à la fois particulièrement satisfaisant et d’un peu dérangeant lorsque l’on visionne Watchmen, Chapter 1, la première partie de la version animée du roman graphique du même nom. Dérangeant, parce que le style mélangeant dessins en trois dimensions et images traditionnelles s’éloigne du style habituel du département d’animation de chez DC Comics. Satisfaisant, parce que cette même animation, combinée à un fantastique doublage, en fait peut-être la meilleure version de l’oeuvre, jusqu’à présent.
Oh, il y a bien eu le film, en 2009. Ou même la minisérie, quelques années plus tard, qui se déroulait 30 ans après les événements du film, en continuant de creuser les thèmes déjà abordés comme le racisme, la violence communautarisme, un nationalisme américain jamais restreint par la défaite au Vietnam, etc. Sans oublier le roman graphique, l’oeuvre originale d’Alan Moore qui est devenue culte. Et qui, encore aujourd’hui, jete un regard plus que froid sur une Amérique en train de se perdre lentement en elle-même.
Ceux et celles qui auront vu le film, ou qui auront lu le roman graphique, se retrouveront sans surprise en terrain connu; après tout, il s’agit d’une adaptation très largement fidèle au matériel original, à l’exception de quelques libertés qui sont largement les bienvenues, histoire d’offrir un peu plus de flexibilité et d’améliorer la fluidité de la chose.
Après tout, le roman graphique a toujours eu des allures de monolithe, surtout si l’on décide de plonger dans la version intégrale, plutôt que dans la version publiée en feuilleton, comme cela fut d’abord le cas. Le film, lui, avait certainement trouvé son public, représentant sans doute l’une des meilleures réalisations de Zack Snyder. Pourtant, pour des gens ne connaissant pas le roman graphique, la pente pouvait être raide.
Le film d’animation en deux parties, lui, ne semble pas non plus déroger du matériel original – à moins que la suite ne nous réserve des surprises. Mais on ne peut s’empêcher de penser que scinder la chose en deux parties d’environ 1h15 chacune est une décision judicieuse. Tout d’abord, cela permet de mieux structurer le rythme de l’oeuvre, sans nécessairement changer trop d’aspects du roman graphique, ce dernier pouvant être longuet sous certains aspects.
Ensuite, sans les limitations d’un vrai tournage, il est possible de faire preuve d’un peu plus d’audace, que ce soit pour les angles de « caméra », les effets spéciaux, etc. Il ne faut pas oublier, après tout, que bien des choses ont changé à Hollywood en 15 ans. Mais même si les reprises sont à la mode depuis bien longtemps, le choix de DC Comics s’imposait. Surtout que le film de Snyder changeait un aspect important du scénario original. Voici maintenant l’occasion, certainement, de raconter la « bonne » version du scénario.
Il existe donc, maintenant, trois versions de l’histoire originale de Watchmen: le roman graphique, le film avec de véritables acteurs, et le film d’animation en deux parties. Sans compter la minisérie télévisée. Et cette trinité (ladite minisérie mise à part) permet d’aborder cette oeuvre majeure sous la forme que l’on juge être la plus appropriée. Un peu comme l’univers du Transperceneige, avec ses BD, son film et sa série télé.
Franchement bien animée, fidèle au matériel original et offrant une perspective tout à fait importante sur la société américaine et son penchant pour l’autodestruction et le nihilisme, Watchmen, Chapter 1 est la preuve qu’il se produit encore d’excellents films d’animation pour adultes. Une chance!