En Inde, le gouvernement entend appuyer sur l’accélérateur et favoriser la multiplication des opérations de fracturation hydraulique. Mais selon des chercheurs de l’Université de Surrey, l’absence de réglementation en la matière pourrait provoquer une catastrophe dans ce pays où l’approvisionnement en eau dépend d’un équilibre fragile.
Comme le rappellent les auteurs des travaux, l’Inde veut se tourner vers le gaz de schiste comme énergie de transition, et a annoncé pas moins de 56 projets de fracturation dans six États. Malgré la promesse d’indépendance énergétique, l’étude des chercheurs de l’Université de Surrey tire la sonnette d’alarme à propos de la capacité du pays à affronter les risques hydriques uniques liés à la fracturation.
Cette fracturation, appelée fracking dans la langue de Shakespeare, implique l’injection de fluide à haute pression dans des couches rocheuses afin de provoquer un relâchement de gaz naturel.
Ce processus est controversé en raison de ses impacts environnementaux majeurs, particulièrement du côté des ressources en eau.
L’étude souligne d’ailleurs que le cadre réglementaire indien servant à surveiller ce processus est basé sur des règles concernant le forage conventionnel, ce qui ne tient pas compte des défis spécifiques liés à la fracturation.
Selon Shashi Kant Yadava, principal auteur de l’étude et spécialiste des questions réglementaires en lien avec l’environnement, il existe quatre principaux enjeux qui nécessitent une intervention immédiate:
- La contamination de l’eau: les fluides de fracturation et le relâchement de méthane peuvent contaminer les réserves souterraines d’eau potable;
- L’utilisation accrue de l’eau: les opérations de fracturation consomment de très grandes quantités d’eau, ce qui peut assécher les ressources locales;
- La gestion de l’eau: traiter et disposer des eaux contaminées qui retournent à la surface est une tâche complexe;
- Les risques de séismes: l’injection des fluides de fracturation peut provoquer des tremblements de terre.
En effectuant une comparaison avec l’industrie américaine du gaz de schiste, l’étude souligne les manquements existants, en Inde, par rapport au cadre réglementaire existant au pays de l’Oncle Sam.
Aux États-Unis, affirme-t-on, diverses agences environnementales ont mis en place des mesures pour mitiger l’impact de la fracturation, notamment en surveillant la qualité de l’eau, en imposant la divulgation des produits chimiques utilisés lors du processus d’injection, ou encore en forçant les exploitants à respecter un programme strict de gestion des déchets.
Pour M. Kant Yadav, « l’étude se termine avec une mise en garde sévère: l’Inde doit réévaluer le développement commercial des opérations de fracturation, en plus de mener une enquête scientifique rigoureuse à propos des impacts potentiels sur les ressources hydriques. De plus, notre étude réclame un réexamen des normes étatiques et fédérales ».
Toujours au dire du spécialiste, « cette étude est un appel à l’action pour les politiciens et les décideurs. Il existe un vrai danger de crise environnementale grave et imminente si des gestes draconiens ne sont pas posés. Alors que l’Inde progresse afin d’atteindre ses objectifs énergétiques, l’équilibre en sécurité énergétique et sécurité de l’approvisionnement en eau ne doit pas être sous-estimé ».