Il y a de ces albums qui exploitent si bien un concept qu’on en vient à se demander si l’oeuvre ne risque pas de devenir une parodie d’elle-même. Red Room, le plus récent disque de la formation PIG, frôle la démarcation entre le sérieux et le « trop sérieux », mais sans jamais tomber du mauvais côté de la clôture. En fait, le résultat est franchement intéressant, avec de multiples influences qui s’y entrecroisent.
D’emblée, PIG, le projet solo de l’artiste britannique Raymond Watts, semble pratiquement faire partie des meubles. Si M. Watts est actif depuis plus d’une quarantaine d’années, la « formation », elle, a connu trois périodes d’activité, dont la plus récente depuis 2013.
Avec un son résolument industriel, PIG a tourné avec des grands noms du milieu, notamment Nine Inch Nails. Et c’est d’ailleurs NIN que les mélomanes auront l’impression d’entendre, dès les premières mesures de Crumbs Chaos and Lies, la première pièce de cet album Red Room. Rappelons d’ailleurs que des red rooms, sorte de légendes urbaines rattachées au Dark Web et autres lieux numériques peu recommandés, seraient des lieux où des tueurs s’amusent à dépecer leurs victimes, le tout devant un public branché sur un site internet spécialisé.
Le ton est donné, bref; la musique de Red Room déborde de guitares électriques agressives, de percussions évoquant des coups de tonnerre, ainsi que de thèmes rattachés à la violence, au désespoir, au goût (et à la couleur) du sang… Le tout, bien souvent, sur fond de musique lancinante, obsédante, dérangeante. On a l’impression que quelque chose rôde entre les notes, qu’un monstre cherche à nous attirer dans ses griffes. À moins que les hommes ne soient les bêtes les plus sanguinaires?
Il y a quelque chose de fascinant, dans cette musique rappelant les années 1990, les décors décharnés de films d’horreur un peu psychédélique. Un peu comme si The Crow, ou encore Blade, avait donné un peu de leur âme cinématographique pour contribuer à l’enregistrement. Ajoutez-y du NIN, comme déjà mentionné, ou encore du Rammstein, et vous obtenez un produit musical sortant franchement de l’ordinaire qui n’a pas peur de pousser son concept jusqu’au maximum, sans jamais qu’on ait l’impression que M. Watts se fout un peu de notre gueule, ou qu’il se prenne pour un autre.
Brutal, frontal, mais aussi étrangement mélodique, caressant, enveloppant…, l’album Red Room, de la formation PIG, réussit à nous sortir suffisamment de notre zone de confort, sans toutefois briser l’illusion. Il s’agit d’un coup particulièrement bien réussi, pour Raymond Watts, qui nous prouve qu’il est encore tout à fait pertinant, même après 44 ans de carrière.