Qui n’a jamais vu Saving Private Ryan? Qui n’a jamais vu ces images terribles des soldats américains massacrés par milliers à Omaha Beach, le 4 juin 1944, lors du débarquement de Normandie? Vingt-six ans après sa sortie, ce film de guerre de Steven Spielberg témoigne encore du fait que ce réalisateur est un maître incontesté de la technique. Pour tout le reste, toutefois, le long-métrage affiche ses failles.
Ses failles, oui: car même avec une pluie d’Oscars, notamment pour des questions techniques, toutefois, y compris le son, les effets sonores et le montage, mais aussi pour la récompense du meilleur réalisateur destinée à Spielberg, cette histoire de soldats américains envoyés loin en Normandie pour ramener un certain James Ryan (Matt Damon), dont les trois frères ont aussi été tués au combat, étonne par son côté ordinaire et – osons le dire – fade.
La faute se trouve peut-être du côté du scénario signé Robert Rodat, qui signera aussi le script du Patriote, avec Mel Gibson, ou encore Thor: The Dark World, ou même 10,000 BC. Rien de médiocre, soit, mais rien de fantastique, non plus.
Et dans Saving Private Ryan, outre cette idée un peu ridicule d’envoyer un groupe de soldats, risquant leur vie au passage, pour sauver un seul homme, la formule est archiconnue: on introduit un nouveau membre au sein d’une équipe rodée, afin de permettre aux cinéphiles de découvrir les dynamiques à l’aide d’un regard neuf, puis on fait évoluer le tout vers une apothéose finale, en tuant quelques personnages de soutien, ici et là.
La chose avait déjà été tentée avant, et c’est exactement la même structure qui sera employée dans Fury, un autre film de guerre sorti en 2014, et mettant cette fois Brad Pitt en vedette, plutôt que Tom Hanks.
Nos deux chefs de groupe sont d’ailleurs des vétérans usés par la guerre, avec des traumatismes évidents, même si le personnage de Hanks semble moins détaché de la vie, faisant plutôt preuve d’un humanisme qui l’honore.
Mais voilà, Tom Hanks aura beau très bien jouer, on n’échappe pas à cette structure classique où un membre de l’escouade sera tué ou blessé à chaque étape importante de l’histoire. Des personnages que l’on n’aura pas vraiment appris à connaître, d’ailleurs. On aura beau rendre la chose dramatique, après avoir vu des dizaines de figurants mourir sur la plage 45 minutes plus tôt, y compris à la suite d’actes de violence terribles, on en vient à être légèrement blasés.
On appréciera toutefois ces apparitions d’acteurs connus (ou pas connus), à l’époque, comme Vin Diesel, Paul Giamatti, Nathan Fillion, etc. Autant de petits moments intéressants, relativement bien interprétés, qui ajoutent de la couleur à un film particulièrement sombre et triste.
Toujours un sans faute sur le plan de la technique, Saving Private Ryan demeure un film marquant de l’histoire hollywoodienne, entre autres parce qu’il a aussi donné naissance à tout un sous-genre du jeu de tir à la première personne, avec des titres comme Medal of Honnor et le très cinématographique Call of Duty.
Force est d’admettre, toutefois, que l’esbroufe visuelle ne remplace pas un scénario très ordinaire et des personnages peu attachants que l’on fait disparaître au compte-gouttes, sans que cela ne nous affecte réellement.