La possibilité d’un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, en novembre prochain, a poussé les spécialistes de l’Economist Intelligence Unit (EIU), un service rattaché au magazine The Economist, à envisager les impacts économiques, politiques et sécuritaires d’un tel deuxième mandat. Et ce sont les voisins des États-Unis, en Amérique du Nord et en Amérique Centrale, mais aussi plusieurs pays asiatiques qui en feraient les frais.
Le document en question, publié ce mois-ci, évoque un « indice de risque Trump », c’est-à-dire « un indice visant à évaluer le risque d’exposition d’un pays donné à une nouvelle présidence Trump », peut-on d’ailleurs y lire.
L’indice en question s’appuie sur trois aspects, c’est-à-dire les questions commerciales, les dossiers liés à l’immigration, ainsi que ceux liés aux enjeux de sécurité.
Et en vertu de ces trois critères d’évaluation, c’est le Mexique, mais aussi le Costa Rica, la République dominicaine, Panama, ou encore le Salvador et le Honduras, qui feraient partie des nations les plus exposées aux retombées d’engagements d’une future administration Trump dans l’un ou l’autre de ces domaines.
Les 10 pays les plus exposés sont d’ailleurs déjà des nations ayant des liens étroits avec les Américains. En plus des pays situés sur le continent américain, on trouve aussi l’Allemagne, la Chine et le Japon. Ces trois puissances mondiales ont beau se trouver dans des situations différentes – l’Allemagne est un allié au sein de l’OTAN, tout comme le Japon est un partenaire sécuritaire de Washington, et les deux ont des échanges commerciaux massifs avec les États-Unis, alors que la Chine est de plus en plus vue comme un adversaire géopolitique, même si le poids des échanges commerciaux entre les deux géants est titanesque –, elles devraient toutes subir les retombées d’éventuels durcissements liés à la plateforme d’un potentiel nouveau président républicain.
« En plus d’accumuler les surplus commerciaux avec les États-Unis, l’Allemagne et le Japon dépendent également de garanties de sécurité fournies par l’Amérique, et dépensent relativement peu pour leur armée », écrivent ainsi les spécialistes de l’EIU.
À l’opposé, les pays ayant moins de liens avec les États-Unis obtiennent un « score » plus faible en termes d’indice de risque d’une nouvelle administration Trump.
Le Canada et le Mexique dans la ligne de mire
Du temps de son mandat présidentiel, Donald Trump n’a jamais caché son opposition face au Mexique, voire son mépris envers ce pays situé au sud des États-Unis.
« Ils nous envoient leurs meurtriers, leurs bandits, leurs violeurs », avait-il d’ailleurs déclaré lors de la première journée officielle de sa campagne visant à obtenir la nomination républicaine en vue de la présidentielle de 2016. C’est aussi Donald Trump qui a clamé, sur toutes les tribunes, qu’il imposerait la construction d’un mur à la frontière mexico-américaine, mur qui « serait payé par le Mexique ». Certaines parties dudit mur ont bel et bien été construites – il s’agit en fait d’une grande clôture –, mais ces démarches ont été largement entravées par des poursuites, des problèmes logistiques et techniques, ainsi que des embûches politiques.
Le Mexique n’a jamais versé un cent pour ces travaux, la facture étant plutôt épongée par les contribuables américains.
Et donc, si le Mexique est largement à risque de subir un choc protectionniste américain en cas de victoire de Trump en novembre, le Canada, le voisin du nord avec qui les relations sont largement meilleures, n’est pas en reste. Après tout, le Canada a comme principal partenaire commercial son voisin du sud. Et donc, ces deux pays, réunis avec les États-Unis au sein de l’accord de libre-échange Canada-États-Unis-Mexique, ont tout à craindre du retour de Trump à la Maison-Blanche, estiment les experts de l’EIU.
Enjeux sécuritaires et migratoires
Lors de son premier mandat, Donald Trump avait pesté à plusieurs reprises contre les pays qui, selon lui, « ne payaient pas leur part », c’est-à-dire n’atteignaient pas le seuil des 2% du PIB investis dans la Défense, un seuil fortement suggéré au sein de l’OTAN. Et la chose ne serait pas mieux dans un deuxième mandat, lit-on dans le rapport.
Ainsi, des alliés de l’OTAN en Europe centrale et de l’Est, « comme la Bulgarie, l’Estonie et la Lettonie », sont « fortement à risques ».
« Cela provoquera des inquiétudes, en raison de leur vulnérabilité potentielle si les relations entre l’OTAN et la Russie se détériorent au point d’en arriver au conflit armé », lit-on encore. D’ailleurs, Donald Trump s’est aussi engagé à cesser toute aide militaire de Washington à Kiev, une aide pourtant cruciale pour combattre l’envahisseur russe sur son territoire.
Du côté des questions liées à l’immigration, les pays les plus à risque sont ceux qui s’appuient très largement sur les transferts d’argent envoyés par les travailleurs temporaires, les migrants ou les nouveaux arrivants à destination de leur pays d’origine. Ainsi, la note d’information précise que le Salvador, la République dominicaine, le Honduras, le Guatemala, le Mexique (encore lui)… tous ces pays relativement voisins des États-Unis, et dont une partie de la population migre vers le pays de l’Oncle Sam, où va y travailler de façon temporaire, pourraient être durement affectés.
Autrement, les pays dont la population étudiante voit l’Amérique comme endroit idéal pour acquérir des connaissances, comme Hong Kong, la Corée du Sud et Taïwan, sont aussi dans la ligne de mire.
Et comment éviter ces écueils? Les experts de l’EIU sont en partie avares de mots sur cette question, mais suggèrent tout de même d’entretenir de bonnes relations avec M. Trump, dans le cas où celui-ci reviendrait au pouvoir. Après tout, écrivent-ils, l’homme d’affaires a un faible pour la bonne entente avec ses homologues, le tout de façon directe, plutôt qu’à travers des échanges diplomatiques.