Cinéphiles, à vos scaphandres, pistolets laser, ou encore à votre combinaison moustaches et speedo orange criard: la science-fiction débarque sur les écrans de la Cinémathèque québécoise, le temps d’un été riche en aventures intersidérales.
Depuis le 2 juillet, et jusqu’au 25 août, ce sont donc plus de 100 longs-métrages d’ici et d’ailleurs qui attendent les passionnés du genre, mais aussi les néophytes. Le tout en collaboration avec le festival Fantasia, qui était déjà le partenaire de la Cinémathèque en 2023, pour un cycle de projections de films d’horreur.
« Depuis le début de ce genre de cycles – ça a commencé avec l’érotisme, puis avec la musique… On essaye d’avoir une approche transversale de l’histoire du cinéma, soit à travers un genre, soit à travers une dimension du cinéma », mentionne au bout du fil Marcel Jean, directeur général de cette institution installée dans le coeur du Quartier latin.
« Il s’agit de reprendre toute l’histoire du cinéma, mais selon un point de vue particulier. »
Toujours de l’avis de M. Jean, c’est d’ailleurs le succès du cycle horreur, l’an dernier, qui a justifié l’organisation d’un cycle science-fiction, cet été. « L’horreur a été le plus grand succès de tous les cycles d’été, depuis qu’on en organise. Et c’était un contexte assez difficile, l’été dernier, avec des travaux, etc. Cela a contribué à nous amener du côté de la SF, parce que nous nous sommes dit que nous pouvions aller vers un cinéma de genre pur, encore cette année. Et ce sont deux genres qui ont longtemps été considérés comme mineurs sur le plan artistique. »
« Ce sont des clichés, on le sait! Quand on recule dans l’histoire du cinéma, même jusqu’à Méliès, on sait à quel point la science-fiction est déjà très présente. Il y a Metropolis de Fritz Lang, et ainsi de suite », indique encore Marcel Jean.
Le voyage dans la Lune et le classique cultissime du cinéma expressionniste allemand seront d’ailleurs projetés durant ce cycle, en compagnie d’autres oeuvres de l’époque du cinéma muet.
Selon le directeur général de la Cinémathèque, « la science-fiction traverse l’histoire du cinéma ». À preuve, dit-il, certains des plus grands cinéastes, « comme Tarkovski et Kubrick », ont produit d’extraordinaires films qui sont autant de piliers du genre.
De la SF bien québécoise
Et à travers ces oeuvres d’un peu partout dans le monde qui seront projetées d’ici la fin août, y compris les États-Unis (Gattaca, Nope, Interstellar, etc.), mais aussi l’Europe (Children of Men, La guerre des mondes (celui de 1954, mais aussi celui avec Tom Cruise, Renaissance, Le Cinquième Élément), sans oublier l’Asie (Akira, Ghost in the Shell, etc.), le cinéma d’ici réussit à se faufiler.
Le public aura donc droit à des projections de Turbo Kid, de Truffe, de l’excellent Viking, ou encore de… Dans une galaxie près de chez vous.
« La science-fiction, c’est quelque chose qui n’existait à peu près pas, au Québec, et qui est apparu très récemment, que ce soit avec Mars et Avril, Turbo Kid, etc. Dans la foulée du développement de Fantasia, la science-fiction est devenue une véritable dimension du cinéma québécois », a déclaré Marcel Jean.
Une sélection par attrition
Il s’en est tourné, des films de science-fiction, depuis les aventures muettes des « astronautes » s’écrasant dans l’oeil de la Lune, au début du 20e siècle. Et pour piger dans ce très vaste répertoire, l’équipe de la Cinémathèque a dû se doter de critères serrés.
« On choisit par attrition », indique ainsi M. Jean, qui évoque « environ 250 titres au départ ».
« Ensuite, il y a des choses là-dedans qui s’avèrent introuvables. Il y a d’autres films où l’on se rend compte que l’omniprésence d’un réalisateur fait en sorte que l’on doit élaguer… Et la notion d’introuvable peut aussi dépendre d’un processus de restauration, où la disponibilité d’une copie est extrêmement limitée avant la sortie de cette nouvelle version. Il y a aussi plein de cinéastes dont tu pourrais montrer plusieurs films, alors tu dois te limiter à un seul, ou peut-être à deux. »
Et les collections de la Cinémathèque ont aussi un impact sur la composition du programme; il est bien plus simple, après tout, d’aller fouiller dans les archives que de devoir passer un accord avec des maisons de distribution, des studios, ou encore de sortir le chéquier pour emprunter des bobines, par exemple.
C’est dans ce contexte que l’on ne trouvera pas de films de la série Star Wars, ou encore de Star Trek; ces sagas ont été jugées trop accessibles, ou trop visibles, en quelque sorte. L’équipe de la Cinémathèque a préféré aller chercher des oeuvres moins connues, parfois même des films « qui ne sont à peu près jamais montrés », et qu’il est donc généralement impensable de trouver sur les services d’écoute en ligne, par exemple.
Et cette stratégie de la sélection, de la curation pour plaire au public semble porter ses fruits; Marcel Jean a indiqué, lors de son entrevue de mercredi, que plusieurs séances étaient déjà à guichets fermés. La preuve, s’il en est, que non seulement la science-fiction est plus populaire que jamais, mais aussi que l’attrait de la salle obscure, l’attrait de l’expérience partagée avec d’illustres inconnus, devant un grand écran, est encore très fort.
Le cycle de science-fiction à la Cinémathèque québécoise, du 2 juillet au 25 août