Presque 10 ans après le premier volet, qui s’était mérité l’Oscar du meilleur film d’animation, à l’époque, Inside Out 2, suite tout aussi inattendue que prévisible – succès oblige –, vient bonifier, sans pour autant améliorer, l’univers de l’un des longs-métrages les plus brillants de la dernière décennie.
Sans être aussi immanquable ou essentiel, on peut admettre qu’il ne s’agit pas ici d’un film inutile, mais qui offre plutôt son lot de bonnes idées pour mériter son existence. C’est déjà ça de gagné.
Si les suites étaient autrefois ambitieuses, et même si elles n’ont jamais été la force des studios d’animation Pixar, on a depuis fait la place au confort afin de s’assurer un maximum de rentabilité. Moins louable, l’effort est compensé par le talent qui est déployé, incluant un travail d’animation de qualité supérieure qui se ressent particulièrement dans les textures et les mouvements, dont on semble encore une fois avoir surpassé l’entendement.
Toutefois, bien que la surprise est passée et qu’il est impossible de ne pas régulièrement effectuer un travail de comparaison avec le chef-d’oeuvre qui le précède, on ne joue pas non plus dans les mêmes plates-bandes et l’encensement ne risque pas d’avoir la même portée, comme en fait montre la sélection du film à Annecy, plutôt qu’à Cannes pour son prédécesseur.
Certes, on entre dans le feu de l’action dans une introduction plutôt impersonnelle qui donne la mauvaise impression d’être dans un Goon ou un Slap Shot, mais on vient vite nous indiquer ce qui nous a échappé dans les dernières années, c’est-à-dire depuis notre dernier contact avec Riley, la protagoniste humaine du film.
Dans ce nouveau film, donc, si l’on ramène encore quelques brillants concepts introduits vers la fin du premier film, on a centralisé davantage l’histoire sur un pan précis de la vie, soit la puberté, voire l’adolescence.
Cela donne au long-métrage une apparence plus épisodique, qui laisse croire qu’on pourrait avoir droit à un nouveau tome de temps à autre. À l’opposé, le premier film ratissait beaucoup plus large dans sa conceptualisation métaphorique de l’existence et de nos émotions, dans son affirmation brillante voulant que la tristesse est une une émotion étroitement liée à la joie.
De gros changements
Dans cette suite, les changements sont autant extérieurs qu’intérieurs, alors que le fait de vieillir implique de nouvelles émotions, mais aussi de nouveaux concepts qui semblent un peu plus tirés par les cheveux et théoriques qu’auparavant.
D’ailleurs, lesdits changements n’ont pas eu lieu seulement dans le cadre narratif, mais aussi en coulisses.
Et si on n’y voit largement que du feu et que l’univers demeure largement le même, difficile de passer sous silence l’absence de voix (comme Bill Hader et Mindy Kaling, qui ne sont pas revenus suite à un écart insultant de salaire), mais aussi d’éléments créatifs majeurs comme Michael Giacchino à la musique (dont l’expertise et le flair manquent beaucoup), et, surtout, l’instinct immuable de Pete Docter, grand manitou du premier film, mais également le maître derrière Monsters, Inc., Up et bien sûr Soul.
Bien qu’on a emprunté l’une de ses idées non utilisées du premier film, il n’a cette fois ni collaboré à la réalisation ni au scénario, bien qu’il soit demeuré présent dans le processus créatif.
Certes, Meg LeFauve revient à l’écriture, grandement aidée par un habitué des névroses en la personne de Dave Holstein, à qui l’on doit la superbe série Kidding, mais aussi plusieurs épisodes de Weeds.
Sauf que l’écriture est plus prévisible et plusieurs bons flashs (sans trop en dire, June Squibb fait certainement partie du running gag le plus brillant) ne justifient pas entièrement une trajectoire qui semble régulièrement calquée sur son prédécesseur. À titre d’exemple qui n’en dévoile pas trop, dans ce principe du chemin du retour, ce n’est pas parce qu’on a changé les alliances qu’on ne comprend pas immédiatement le chemin qu’on tente de tracer. De plus, Kelsey Mann ne fait pas nécessairement preuve d’un style particulier dans ce qui semble être une exécution à numéros pour son premier long-métrage.
N’empêche, la route est divertissante et amusante, peut-être un brin moins captivante (n’en déplaise aux milliers de projets sur le sujet, l’adolescence est-elle si fascinante que cela?) et les nouvelles voix aux rabais ont juste assez de tonus pour faire sourire (comment dire non à Maya Hawke, Ayo Edebiri et Adèle Exarchopoulos?).
Inside Out 2 est donc un beau projet qui livre la marchandise, sans nécessairement la transcender, ce que le premier (oui, encore lui), faisait continuellement. On saluera plusieurs clins d’œil nichés aux amours fictives de jeunesse et ces quelques détours qui marient ingénieusement les différents styles d’animation, puisqu’on ne le répètera jamais assez, rien n’est plus générique et inintéressant que le design des humains dans les films de Pixar.
À noter qu’il y a une scène dans le générique et post-générique, mais que celle-ci est, lui aussi, moins réussie qu’au tour du premier tour de piste.
7/10
Inside Out 2 prend l’affiche en salle ce vendredi 14 juin.