En plus des dizaines de milliers de morts et de la destruction généralisée, la guerre à Gaza a entraîné une autre conséquence: un impact environnemental majeur, révèle une nouvelle étude codirigée par le Dr Benjamin Neimark, de la Queen Mary University de Londres.
Les travaux lèvent ainsi le voile sur les possibles émissions polluantes découlant de ce conflit, alors que les chercheurs réclament que les émissions carbone découlant des affrontements militaires fassent l’objet d’un recensement obligatoire.
L’étude se penche sur les 120 premiers jours du conflit, et révèle que la pollution découlant des combats et des bombardements ont dépassé les émissions annuelles de 26 pays et territoires. Si l’on tient compte des infrastructures militaires construites par Israël et le Hamas, le total de la pollution dépasse le bilan carbone de 36 nations.
Au cours de ces 120 premiers jours, rappellent les auteurs, l’activité militaire était particulièrement intense dans la région, notamment avec les missions de bombardement, les vols de reconnaissance et les attaques de roquettes, toutes des actions particulièrement polluantes.
Pour ce qui est du bilan des infrastructures militaires, les chercheurs ont inclus, dans leurs calculs, l’impact environnemental de la construction des réseaux de tunnels du Hamas et du « dôme de fer » israélien, c’est-à-dire leur système antimissile.
Et lorsque la guerre sera terminée, les efforts de reconstruction de la bande de Gaza entraîneront des émissions supérieures à celles de plus de 135 pays, et représenteront l’équivalent de la pollution annuelle de la Suède, ou du Portugal, affirme-t-on.
Au dire des chercheurs, la période de conflit active, c’est-à-dire les 120 premiers jours de la guerre, sans tenir compte de la période de construction d’infrastructures, a entraîné l’émission de 420 000 à 652 000 tonnes de CO2. Si l’on tient compte de la construction avant et après la guerre, le total augmente de façon importante, pour atteindre une fourchette allant de 47 millions à 61 millions de tonnes de GES.
Des coûts humains et financiers terribles
Cette étude est publiée dans la foulée de pertes humaines et financières dévastatrices. Depuis le début des affrontements actuels, le 7 octobre dernier, plus de 35 000 Palestiniens et 1138 Israéliens ont trouvé la mort, et plus de 100 autres Israéliens et ressortissants étrangers sont toujours aux mains du Hamas.
Environ 54 à 66% des bâtiments de Gaza, y compris des résidences, des écoles, des mosquées et des hôpitaux, ont été détruits ou endommagés. Les coûts financiers, pour Israël, devraient atteindre les 50 milliards de dollars, soutient-on, y compris la reconstruction de Gaza, qui est estimée à 18,5 milliards par la Banque mondiale, et ce, uniquement en termes de dégâts aux infrastructures physiques.
Au dire des auteurs des travaux, si les crises humanitaires suscitent la grande majorité de l’attention mondiale, l’impact environnemental de ce conflit est important et nécessite qu’on s’en préoccupe. Les opérations militaires, selon une précédente étude, sont responsables d’environ 5,5% des émissions polluantes mondiales, mais cette pollution est souvent passée sous silence.
L’équipe de recherche milite ainsi en faveur de méthodologies plus développées pour surveiller et rapporter ces émissions, en mettant l’accent sur l’importance d’inclure les émissions en temps de guerre lorsque vient le temps d’effectuer des calculs liés à la crise climatique.
De l’avis du coauteur de l’étude, le Dr Patrick Bigger, « les émissions carbones associées à l’invasion de Gaza par Israël ne sont pas la raison la plus importante pour laquelle la communauté internationale devrait faire pression en faveur d’un cessez-le-feu – chaque vie encore en danger est importante. Mais ces travaux de recherche démontrent l’importance, à long terme, des impacts sociaux et environnementaux de la guerre, ce qui nous rappelle que les conflits armés nous rapprochent du précipice du réchauffement climatique catastrophique ».