Jamais, dans l’histoire, n’a-t-on recensé autant de conflits armés qui se déroulaient en même temps à travers le globe. Ce bien triste état de fait découle de données recueillies par l’Uppsala Conflict Data Program (UCDP), de l’université du même nom, en Suède.
Ainsi, l’an dernier, quelques 59 guerres et autres conflits, le nombre le plus important depuis le début de la collecte des données, en 1946, faisaient rage dans une région ou une autre de la planète. Les précédents pics, dénombrés en 2020 et 2022, étaient de 56 conflits chacun.
Au même moment, indique-t-on dans ce nouveau rapport, le nombre de morts liées à ces conflits a diminué de moitié par rapport à l’année précédente, cette situation s’expliquant largement par la fin de la guerre particulièrement violente dans la région du Tigré, en Éthiopie, vers la fin de 2022.
« Nous pouvons toutefois toujours constater que des guerres inhabituellement meurtrières se poursuivre, comme celle en Ukraine, avec près de 71 000 tués l’an dernier, ou encore la guerre d’Israël contre le Hamas, qui a fait plus de 22 000 victimes en 2023 », explique Shawn Davies, analyste principal au sein de l’UCDP.
Et bien que le nombre total de décès découlant de la violence organisée, à l’échelle mondiale, a diminué de moitié comparativement à 2022, passant de 310 000 à 154 000, 2023 a malgré tout été l’une des années les plus meurtrières depuis le début de la récolte de données, par l’UCDP, sur les morts dans le cadre de conflits, en 1989.
« Seulement trois années ont été plus sanglantes que 2023. Outre le génocide rwandais, en 1994, 2021 et 2022 complètent ce triste trio », a encore indiqué M. Davies.
On a ainsi dénombré neuf conflits ayant plus de 1000 morts en un an, en 2023, soit un de plus qu’en 2022. La plupart de ces guerres ont eu lieu en Afrique; la guerre civile au Soudan, qui a éclaté en 2023, est ainsi classée comme étant le troisième conflit le plus meurtrier de l’année, après ceux en Ukraine et au Proche-Orient.
Et dans plusieurs guerres, la population civile est aussi prise pour cible par les belligérants. Ainsi, des milliers de citoyens ont péri dans les combats au Soudan, au Burkina Faso, en Israël et au Myanmar, entre autres. Au total, un peu plus de 10 000 civils sont morts dans ces violences qui les ciblaient spécifiquement, comparativement à 12 000, l’année précédente.
L’État islamique toujours mortellement actif
De son côté, Therese Petterson, elle aussi rattachée à l’UCDP, rappelle que le groupe armé État islamique n’est pas disparu, même si ses agissements meurtriers ne se retrouvent plus dans les médias. « Pour la neuvième année consécutive, dit-elle, l’EI est le groupe qui a tué le plus de civils dans des violences unilatérales, bien que ce nombre a diminué de façon importante par rapport à 2022. »
« Le groupe état actif dans 16 pays différents, où ils ont commis des actes tels que des fusillades, des décapitations et des attentats suicides de grande envergure », a ajouté la chercheuse.
Du côté des conflits entre groupes où des États ne sont pas impliqués, appelés conflits non étatiques, l’UCDP rapporte un léger recul des morts en 2023. Un total de 20 900 décès ont été recensés, l’an dernier, dans le cadre de 75 de ces guerres sans implication gouvernementale.
« Il est trop tôt pour évoquer un changement dans la tendance. Les 10 dernières années ont été les 10 années les plus mortelles lorsqu’il est question de ce genre de violence, une violence qui, ces dernières années, ont très largement été liées à des affrontements entre des gangs et des cartels », note Mme Petterson.
La majorité de ces conflits non étatiques ont lieu en Amérique latine, principalement au Mexique et au Brésil, où la violence est concentrée dans les villes et le long des routes de trafic de la drogue.
« Mais ce genre de violence est aussi devenue plus présente en Europe et, en 2023, le premier conflit actif entre gangs sur le Vieux Continent a été recensé, lorsque deux groupes rivaux de Marseille, en France, ont ouvert les hostilités », a mentionné Garoun Engström.
Les statistiques de 2023 seront analysées et présentées dans le cadre d’une publication dans le Journal of Peace Research.