Les ingénieurs en robotique travaillent depuis des décennies, et ont investi des millions de dollars en recherche pour tenter de créer un robot qui puisse marche ou courir aussi bien qu’un animal. Malgré tout, plusieurs de ces animaux peuvent encore accomplir des gestes qui sont impossibles pour un robot contemporain.
« Un gnou peut migrer sur des milliers de kilomètres de terrain accidenté, une chèvre des montagnes peut littéralement escalader une falaise, en trouvant des appuis qui ne semblent même pas exister, et les coquerelles peuvent perdre une patte comme si de rien n’était », affirme le Dr Max Donelan, professeur au département de physiologie biomédicale et de kinésiologie de l’Université Simon Fraser, en Colombie-Britannique.
« Nous n’avons pas de robots capables de déployer autant d’endurance, d’agilité et de robustesse. »
Pour comprendre pourquoi les robots ont si en retard sur les animaux, et pour déterminer l’ampleur de ce phénomène, une équipe de chercheurs et d’ingénieurs ont effectué une étude détaillée de plusieurs aspects des robots capables de courir, en les comparant avec leurs équivalents dans le monde animal, des travaux qui ont été publiés dans Science Robotics.
Ladite étude a révélé que selon les normes utilisées par les ingénieurs, les composantes biologiques sont étrangement moins efficaces que les pièces fabriquées. Là où les animaux excellent, cependant, c’est dans l’intégration et le contrôle de ces composantes.
Les chercheurs ont étudié cinq « sous-systèmes » différents qui se combinent pour créer un robot capable de courir, soit l’énergie, la forme, la mise en mouvement, la détection et le contrôle, et les ont comparés à leurs équivalents biologiques. Précédemment, l’hypothèse largement acceptée consistait à affirmer que la meilleure performance des animaux était imputable à la supériorité des composantes biologiques.
« Il est en fait apparu qu’à l’exception de cas mineurs, les sous-systèmes artificiels sont plus efficaces que leurs versions biologiques, et sont même parfois capables d’être bien plus performants », soutient Tom Libby, l’un des participants de l’étude.
« Mais ce qui est aussi très, très clair, c’est que si vous comparez les animaux aux robots dans une perspective globale, en termes de mouvement, les animaux sont incroyables. Et les robots sont encore loin derrière. »
Rattraper l’évolution
Tout n’est cependant pas mauvais pour le domaine de la robotique: les chercheurs ont ainsi noté que si l’on compare la courte période de temps du développement de ce secteur et les innombrables générations d’animaux ayant évolué pendant plusieurs millions d’années, le progrès réalisé a en fait été très rapide.
« La technologie progressera plus rapidement, parce que l’évolution n’est pas dirigée », rappelle le Dr Sam Burden, un autre scientifique ayant collaboré aux travaux.
« Nous pouvons ainsi corriger la façon dont nous concevons les robots, en plus de pouvoir apprendre quelque chose, avec un robot, et ensuite téléverser ces informations dans tous les autres appareils, ce que ne permet pas la biologie. Alors, il existe des façons selon lesquelles nous pouvons progresser plus rapidement. Mais l’évolution a une sacrée longueur d’avance. »
Plus qu’un simple défi d’ingénierie, les robots véritablement capables de courir pourraient être utilisés dans de nombreux domaines, affirme-t-on. Qu’il s’agisse de régler le problème du « dernier kilomètre », en ce qui concerne les livraisons dans un monde conçu pour les humains, et donc parfois difficile à naviguer pour les machines; effectuer des recherches dans des environnements risqués, ou encore manipuler des matériaux dangereux, les applications potentielles sont plurielles.
Les auteurs de l’étude espèrent que leurs travaux permettront de mieux diriger les futurs développement de la technologie robotique, en se concentrant nos pas sur la production de meilleures pièces, mais en comprenant comment mieux intégrer et contrôler les systèmes existants.
Pour le Dr Donelan, « à mesure que les ingénieurs adaptent les principes d’intégration du monde biologique, les robots coureurs devront aussi efficaces, agiles et robustes que leurs équivalents vivants ».