Le 24 avril dernier, le Trio Wanderer était en ville. C’est la direction artistique de la Salle Bourgie du Musée des Beaux-Arts de Montréal qui avait eu l’excellente idée de l’inviter.
Après 35 années de collaboration, Jean-Marc Phillips-Varjabédian, violon; Raphaël Pidoux, violoncelle et Vincent Coq, piano, forment un trio toujours aussi pertinent. Annoncés avec un programme tout romantique, les trois interprètes ont fait honneur à leur réputation. Bien qu’ils négligent le veston, les trois musiciens forcent le décorum. Pas d’adresse au public en début de prestation, mais seulement pour annoncer l’œuvre journée en rappel. Dans le même sens, on peut noter que personne, dans cette salle quasi comble, n’a commis la maladresse d’applaudir entre les mouvements. Nous étions entre nous, entre initiées et admirateurs.
Dans la première œuvre au programme, le Trio pour piano, violon et violoncelle no 1 en ré mineur, op. 63, de Robert Schumann, on sent tout de suite l’énergie qui anime le trio. À un moment, la fougue passe près de devenir fureur et on prend alors la pleine mesure de la magnifique acoustique de la Salle Bourgie. Puis c’est toute la finesse du jeu des interprètes qu’on apprécie dans un élan nostalgique, suivi d’une explosion de joie et d’un finale enlevant. Cette œuvre est presque un programme en soi.
Pour le Trisita de Franz Liszt, le violoncelle de Pidoux se fait envoûtant avant d’être entraîné, comme le violon et le piano, dans une tempête aux accents tziganes, puis dans une colère qui ne demande qu’à s’exprimer. Les accords plaqués à toute vitesse par Vincent Coq nous laissent pantois et essoufflés et s’il y a de la tristesse dans cette œuvre, l’interprétation du Trio Wanderer n’est jamais larmoyante.
Pour clôturer le programme officiel, Franz Schubert était à l’honneur avec le Trio pour piano, violon et violoncelle en mi bémol majeur, op. 100, D.929.
Bien que dans cette œuvre, comme dans la plupart des trios, les rôles soient bien répartis, on pourrait croit que Schubert a eu un faible pour le piano en l’écrivant. Plus encore, on a eu l’impression que le piano avait été fabriqué exprès pour la musique de Schubert. Dès les premières mesures, on a pu comparer le pianiste à un enfant dans un plat de bonbons. C’est avec une joie communicative que Vincent Coq a ébloui l’assistance en volant littéralement sur les touches. C’était impressionnant !
Mais ses collègues n’ont pas été en reste, car ce Schubert a davantage permis à Phillips-Varjabédian de démontrer toute sa virtuosité et à Raphaël Pidoux de faire si bien résonner son violoncelle qu’on aurait pu croire qu’il y avait amplification. Le Schubert a certainement été l’œuvre la plus marquante de cette soirée, d’où l’ovation instantanée et persistante qui a mené à un très joli rappel : D’un matin de printemps, de lili Boulanger.
On a longtemps attendu la venue du Trio Wanderer à Montréal et on espère qu’il reviendra bientôt.