Des abeilles qui peuvent s’associer pour résoudre un casse-tête qu’elles n’auraient pas pu résoudre seules. Une étude sur l’intelligence animale vient d’ajouter ces petites bêtes à la liste (de plus en plus longue) de celles capables de réussir les examens de laboratoire qu’on leur impose.
L’équipe britannique qui en parlait récemment dans la revue Nature s’intéresse aux abeilles depuis des années, et avait en fait déjà signalé qu’on avait sous-estimé leurs capacités: dans une recherche parue en 2023 dans la revue PLoS Biology, la biologiste Alice Bridges et ses collègues avaient décrit des abeilles qui apprenaient à pousser un levier dans une direction précise pour ouvrir une boîte où se trouvait du sucre —, mais qui surtout, préféraient la méthode que leurs congénères leur avaient montrée, plutôt que la leur.
Dans leur nouvelle étude, ils ont complexifié la chose: il faut d’abord pousser un levier bleu, puis un levier rouge. Le fait de l’avoir appris d’une autre abeille faisait une différence plus grande encore : les abeilles de trois colonies différentes laissées à elles seules n’ont pas réussi à résoudre l’énigme, tandis que dans les colonies où on a introduit des abeilles à qui les humains avaient enseigné le truc, celles-ci l’ont transmis aux autres. Les chercheurs notent aussi que les abeilles étaient meilleures pour enseigner la méthode à leurs congénères que les humains ne l’avaient été pour l’enseigner aux premières abeilles.
Et cette étude a été publiée le même jour qu’une seconde étude, sur les chimpanzés celle-là, qui montre, elle aussi, leur capacité à utiliser de « l’information sociale » — en d’autres termes, apprendre en observant les autres individus de leur groupe. Un talent que d’aucuns auraient jadis prétendu être unique aux humains, puisque c’est ce qui définit une culture: une série de comportements communs, appris et non innés, et qui, en s’accumulant, distinguent une société humaine de ses voisines.
Commentant ces deux nouvelles recherches, l’écologiste britannique Alex Thornton y voit une épine de plus dans « le supposé exceptionnalisme humain ». Cette « capacité à apprendre des autres ce qu’un individu seul ne peut pas apprendre, devrait à présent rejoindre l’usage d’un outil et la mémoire épisodique (la capacité à se rappeler des événements spécifiques) » dans la liste des soi-disant jalons qui distingueraient l’humain de l’animal.