Sofia Nappi, une chorégraphe dont il faut retenir le nom et espérer qu’elle reviendra bientôt. Pour cette première à Montréal, dans le cadre de Danse Danse, elle présente avec sa troupe Komoco le spectacle intitulé Ima, qui réunit tous les critères de beauté, d’élégance et d’audace, avec en plus de l’humour, de la tendresse et l’expression des corps poussée à son paroxysme.
Une timide musique au piano introduit le spectacle. La scène est sombre et vide. Une personne sortant des coulisses apparaît en boitant, munie d’une canne de vieillard. C’est une personne âgée, ou plutôt le personnage d’une personne âgée car l’artiste porte un masque ridé aux cheveux blancs. D’autres similaires s’avancent sur la scène. Ils trainent avec eux une grosse malle de voyage, du genre de celles que des voyageurs du xixe siècle emportaient lorsqu’ils quittaient pour des mois leur demeure.
De la malle, les cinq « vieillards », deux femmes et un homme, extraient des simulacres d’instruments de musique, un piano minuscule, une petite guitare, un accordéon miniature… leurs mouvements sont ceux de personnes âgées mais, déjà, on sent bien la présence d’extraordinaires danseurs derrière qui miment les gestes, les accentuent, les rendent superbes, élégants et parfaitement justes à travers leurs difficultés, leurs déhanchements ou leurs fractures.
Une autre musique se fait maintenant entendre, plus joyeuse, interprétée à l’italienne, dansante. Et les cinq personnages tout recroquevillés qu’ils étaient se mettent à déployer toutes les possibilités de leurs corps, toujours dans les limites de chacun de leurs personnages âgés. Le résultat est magnifique. Les danses sont à la fois individuelles, car chaque artiste adopte une personnalité bien marquée, mais aussi collectives et parfaitement coordonnées.
L’impression qui est offerte, c’est que derrière ces personnes qui ont beaucoup vécu, qui jouent entre elles ou se chamaillent, s’aiment ou se disputent, dont les corps sont marqués, voire déformés, par le temps, demeure une jeunesse qui ne demande qu’à se réactiver; la musique produit cet effet
Au bout d’un moment, les danseurs retirent leurs masques, changent de tenue. Tout se fait sur scène autour de la grande malle et les artistes poursuivent leurs danses sur ces chorégraphies de danse contemporaine magnifiques et si originales.
Dans la discussion qui a suivi le spectacle, Sofia Nappi citait certains artistes qui l’inspiraient. J’ai retenu les noms de Pina Baush, Hofesh Shechter, Ohad Naharin, Charlie Chaplin, autant d’artistes de génie dont elle semble bien prendre la suite.
IMA
Direction artistique et chorégraphie : Sofia Nappi.
Interprètes : Arthur Bouilliol, Leonardo de Santis, Glenda Gheller, India Guanzini, Paolo Piancastelli.
Assistant à la chorégraphe : Adriano Popolo Rubbio.
Éclairages : Alessandro Caso.
Conception des costumes : Luigi Formicola
Production: Sosta Palmizi, KOMOCO/ Sofia Nappi.
IMA, du 12 au 16 mars 2024 à la Cinquième Salle de la Place des Arts, à Montréal