Deux ans et demi après la sortie de la première partie de son adaptation du roman de Frank Herbert, qui a rapporté plus de 400 millions $ au box-office mondial en plus de remporter 6 Oscars, le réalisateur, coscénariste et producteur québécois Denis Villeneuve nous présente enfin le très attendu Dune: Part Two.
Cette suite est encore plus épique que le film précédent, tout en respectant la vision déjà établie par le cinéaste, pour qui il était crucial de travailler de nouveau avec les mêmes collaborateurs, notamment le directeur photo Greig Fraser et le monteur Joe Walker. « Ils connaissaient déjà tout du monde que nous avions créé », racontait Villeneuve ce mardi lors d’une conférence de presse virtuelle à laquelle Pieuvre a pu participer. « C’était la première fois que je revisitais l’univers [d’un de mes films]. Et travailler avec les mêmes partenaires signifiait que tout le monde savait exactement ce que je recherchais esthétiquement, en ce qui a trait au vocabulaire cinématographique. »
Dans Dune: Part Two, on retrouve Paul Atreides (Timothée Chalamet) parmi les Fremen, le peuple établi depuis longtemps sur la planète désertique Arrakis, alors qu’il prépare sa vengeance contre ceux qui ont décimé sa famille. Peu à peu, il se rapproche de la jeune guerrière Chani (Zendaya), qui deviendra sa concubine.
Le film renferme de nombreuses scènes d’action explosives, mais mettre en scène ces dernières n’était pas le plus grand défi qui attendait l’équipe, selon le réalisateur. « Ce qui est difficile à faire, c’est de s’assurer qu’on ne perde pas de vue les relations humaines, particulièrement l’histoire entre Paul et Chani. C’est le cœur du film, leur relation propulse tout l’aspect dramatique du film. À travers les yeux de Chani et Paul, on découvre la pression politique, la pression culturelle, l’oppression », explique Villeneuve. « Je disais constamment à mon équipe : “Si on ne croit pas à leur relation, on n’a pas de film.” C’était ma priorité durant tout le tournage. »
À travers le film, on visite une multitude de décors spectaculaires, qui ont été véritablement construits par le directeur artistique québécois oscarisé Patrice Vermette dans la mesure du possible, plutôt que de se fier seulement aux effets visuels créés par ordinateur.
« Chaque décor était stupéfiant, à cause de leur taille et du degré de précision des détails. En entrant dans le sietch [NDLR: le réseau de cavernes où habitent les Fremen], par exemple, c’était grandiose. C’était comme entrer dans une cathédrale », se rappelle Villeneuve. « Puis, en s’approchant des murs, on pouvait voir toutes les gravures de la prophétie des Fremen, dans une langue réelle sur laquelle Patrice et David Peterson ont travaillé, qui signifiait quelque chose. C’était ce niveau d’attention au détail. »
Du noir, du blanc, du gris
Si les principaux antagonistes de Dune: Part Two — le Baron Harkonnen (Stellan Skarsgård), Glossu Rabban (Dave Bautista) et le nouveau venu Feyd-Rautha (Austin Butler) — sont indéniablement maléfiques, d’autres personnages, comme l’Empereur Shaddam IV (Christopher Walken) et sa fille, la princesse Irulan (Florence Pugh), sont plus nuancés. « Le mal pur existe, mais c’est rare. La plupart du temps, c’est une question de point de vue. Bien sûr, personne ne remet en question que le Baron Harkonnen soit maléfique. Mais si on prend un personnage comme l’Empereur, c’est quelqu’un qui est pris dans une joute politique et qui prend de très mauvaises décisions. Est-il maléfique? Je n’en suis pas certain », confie Villeneuve.
« Et une chose importante à ne pas oublier est que quand Frank Herbert a écrit le premier livre, il avait des intentions très précises. Il voulait que ce soit un récit édifiant, un avertissement à propos des figures messianiques. Et il a été déçu par la façon dont son livre a été reçu à sa parution. Il avait l’impression que les lecteurs croyaient que c’était une célébration de Paul Atreides, alors qu’il voulait que Paul soit un antihéros. Alors il a écrit un second livre, intitulé Dune Messiah, un petit roman qui est un genre d’épilogue qui tente de corriger la perception du premier livre. Sachant cela, j’ai tenté que cette adaptation se rapproche des intentions initiales de Frank Herbert, c’est-à-dire que le film est un avertissement. Ce n’est pas une célébration de Paul. Paul devient ce qu’il condamnait. »
Près de 60 ans après la publication du roman Dune, qui a fait l’objet de nombreuses suites littéraires et de plusieurs adaptations pour le cinéma et la télévision, qu’est-ce qui explique l’attrait durable de cette saga de science-fiction?
« Je crois que la quête identitaire de Paul Atreides est émouvante. Le fait que c’est un garçon qui trouve finalement une maison et qui consolide son identité dans une autre culture », mentionne Villeneuve.
« C’est aussi un livre porteur d’espoir à propos de l’esprit humain. Ce n’est pas nécessairement dans le film, mais dans le livre, il y a cette idée que l’intelligence artificielle a été bannie, que l’esprit humain a triomphé, qu’il faut améliorer l’humanité au lieu d’améliorer les machines. Il y a également toute l’exploration de l’impact de l’écosystème sur les êtres humains, de notre relation avec les écosystèmes et de comment nous devrions renouer avec le caractère sacré de notre relation avec la nature. Au lieu de tenter de dominer la nature, être en harmonie avec elle et la respecter, comme les Fremen le font. »