Derrière les calculs sur la vitesse d’expansion de l’Univers, il y a une énigme: une différence dans les chiffres, tout dépendant de ce que l’on mesure. Les dernières observations du télescope spatial James-Webb ont permis de raffiner les calculs, mais la disparité demeure.
Appelée « tension de Hubble », il s’agit de la différence entre l’expansion cosmique observée et celle qu’elle devrait être — une mesure appelée la constante de Hubble (du nom de l’astronome Edwin Hubble, dans les années 1920). En gros, l’expansion est plus rapide que ce que les modèles permettent avec ce que l’on connaît du Big Bang. En termes simples, cela veut dire qu’il manque quelque chose de fondamental aux équations, et les observations du nouveau télescope ne permettent même pas de croire qu’on s’approche d’une solution. Plusieurs textes de physique théorique ont conclu ces dernières années qu’il n’y aurait pas de solution simple.
Pour la cosmologie, c’est rien de moins que sa plus importante controverse: une controverse qui se rattache à la composition de l’Univers, dont seulement 5 % est fait de matière ordinaire, contre 27 % de « matière sombre » et 68% d’énergie sombre. Si on ne sait pas de quoi ces deux dernières sont constituées, au moins est-on capable de déduire que c’est la force de gravité de la matière sombre qui donne aux galaxies leur structure, et que c’est la pression exercée par l’énergie sombre (une sorte de force gravitationnelle répulsive) qui détermine l’accélération de l’Univers. Cette force répulsive aurait progressivement pris le dessus dans l’évolution du cosmos, expliquant le fait que l’expansion s’accélère.
Mais si ce modèle permet d’expliquer pourquoi l’expansion s’accélère — une découverte qui, elle-même, a tout juste 25 ans— il ne permet pas d’aller beaucoup plus loin: quelle est cette vitesse, et l’accélération se poursuivra-t-elle indéfiniment. Le fait qu’on ignore ce qu’est l’énergie sombre n’aide pas non plus à comprendre, et le fait que certains physiciens évoquent que cette énergie sombre pourrait représenter une « nouvelle physique », signifie que le consensus pourrait se faire attendre.
Depuis ce moment où, il y a un quart de siècle, on a établi qu’il y avait accélération, les astronomes ont tenté différentes mesures, que ce soit dans notre « banlieue » cosmique —les plus proches galaxies— ou bien aussi loin qu’il était possible d’observer. En gros, les nouvelles observations du James-Webb confirment celles suivant laquelle l’accélération « réelle » est 8% plus rapide que l’accélération « théorique ».
Il se trouve encore des partisans de la théorie voulant que tout cela soit un problème dû aux limites de nos observations: autrement dit, cette différence serait un « mirage ». Ils ont moins d’arguments à mesure que les observations en question se raffinent, mais ils n’ont pas de raison de lâcher le morceau, du moins tant qu’on n’a pas établi s’il y a bel et bien une « nouvelle physique » cachée dans l’énergie sombre.