Après neuf albums à sa feuille de route depuis 1999, Vincent Vallières s’octroie un changement de cap, le temps d’une œuvre à l’encre de liberté. Du bitume et du vent (Mémoire d’encrier) traduit en une série de récits l’état d’infini de la route en solitaire devenant contemplation et rencontre. Échange avec un écrivain révélé à lui-même.
Une évidence semble résonner en Vincent Vallières qui s’apprête à lancer son œuvre à Montréal, Sherbrooke et Québec : ce livre constitue une assise vers l’autre. Né d’une part de nostalgie de jeunesse, Vallières puise dans ses souvenirs, pour se géolocaliser dans ce voyage intérieur où il roule seul face à un vaste territoire. Celui du Québec inscrit en son être, espace de révélation artistique. Le narrateur évoque ses coups de cœur musicaux, dont ce folk de Dylan vibrant en lui.
Car la musique est indissociable de la route, surtout sur de longues distances s’échelonnant sur des centaines de centaines de kilomètres. « Il y a souvent des moments de silence et seulement ma voix sur plusieurs tronçons, sans réseau pour télécharger de la musique… », relate l’aventurier.
L’itinérance du chanteur
Si la liberté et son mode d’expression de nulle part en solitaire se déroule avec prose d’aussi loin qu’à Natashquan, l’île aux Lièvres, et Mani-Utenam, jusqu’aux lointaines pointes canadiennes, c’est pour mettre en scène le personnage central : celui du chanteur Vincent Vallières, temporairement à l’abandon. Un angle auquel il tenait pour exprimer plaisir et extase.
Loin des haltes touristiques, le narrateur sans préméditation s’élance d’un lieu à un autre, à la rencontre de son public, de la scène, de l’intimité et du vrai. « La réalité y est toute autre, je suis tellement chanceux! Se donner du temps est devenu un privilège, un luxe. Je suis toujours à la course! », clame l’auteur qui grâce à l’écriture fait un pied de nez à l’espace temporel.
Hommage à l’humanité en lutte
À plusieurs haltes, Du bitume et du vent s’écrit à la sueur du courage des gens de l’ombre. Ceux et celles qui sauvent des lieux à l’abandon pour que vive la culture. Une dimension touchant Vallières, reconnaissant de leur apport à sa consécration d’artiste. « Ces diffuseurs sont mes premiers soutiens. Leurs histoires humaines et leurs actions posées à L’Anse-À-Beaufils et Mégantic ont forcé les choses et créé des ponts avec l’histoire et la beauté. La possibilité de la rencontre. Il ne faut pas sous-estimer la transformation du patrimoine qui nous assoit sur quelque chose », croit l’artiste, convaincu.
Un autre volet abordé, toujours avec l’humilité du souvenir : la lutte des travailleurs dévoués à qui on montre la porte sans mot dire, racontée avec émoi par un voyage dans le temps en 1949 à Val-des-Sources (Asbestos).
Vallières évite de catégoriser l’exercice littéraire sur le même pallier que l’écriture de chansons. Des « sports différents », illustre-t-il. Il insiste pour inscrire les pages de l’œuvre dans un registre de langage devant faire entendre sa voix au lecteur. Avec ses touches de parlé sans détour, un joual naturel par les dialogues, l’écrivain n’affiche aucune prétention et se berce à l’humilité.
Ce qui lui importe : que les mots viennent du cœur, librement et qu’on le suive.
Pour amplifier cet effet dans le prolongement de ses rencontres et pensées, des photos en noir et blanc parsèment les pages pour le plus grand bonheur des sens.
Du bitume et du vent (Mémoire d’encrier) 255 pages
Lancement mercredi 25 octobre à La Livrerie dès 17h (1376 rue Ontario Est, Montréal)