À quelques jours de la toute première représentation de la saison 2023-2024, la directrice et programmatrice de La Rotonde Marie-Hélène Julien, aborde la nécessité et la force de s’unir au Grand Théâtre de Québec pour honorer et sauver la danse contemporaine. Un mariage qui dure depuis 2006 pour cette discipline méconnue à la portée de tous et toutes.
Défendre la danse au Québec
Bon an mal an, depuis 1996, la Rotonde crée un carrefour pour la danse actuelle du Québec et d’ailleurs. Fondée à Québec, la structure ne baisse jamais la garde pour accueillir des artistes ayant le feu pour leur art, unique diffuseur 100 % danse de la Capitale-Nationale. Et avec panache, proposant 18 spectacles pour 2023-2024. Une formule audacieuse, viable grâce aux irréductibles fidèles des 17 dernières années mais surtout, aux moyens de diffusion du Grand Théâtre de Québec.
« Ensemble, on va chercher un plus large auditoire et plus de compagnies à l’international. Il s’agit d’une collaboration essentielle pour la circulation des publics en danse contemporaine », soutient Mme Julien, confirmant qu’un public en commun lie les deux structures. Comme dans tout bon mariage, le partage des risques s’élabore selon une formule 50/50.
Toutefois, depuis la pandémie et l’implantation de l’inflation, l’état de la danse écope de plusieurs maux. Le retour des financements est progressif et les coprésentations n’ont jamais été aussi salvatrices. Le partage des coûts revient ainsi à plusieurs diffuseurs. Dans ce contexte, le retour du grand public en salle n’y est pas encore. La saison 2022 n’a vu que la moitié des salles remplies. Optimisme oblige, Marie-Hélène Julien et ses équipes ont plus d’un tour dans leur sac pour raviver la flamme du public et les convaincre malgré l’inflation d’opter pour une sortie culturelle en danse.
Pour être au diapason du public 2023, de ses attentes et restrictions budgétaires, des formules gratuites de médiation culturelle avec les artistes sont au programme. Des forfaits adaptés pour réduire les prix des billets et l’approche personnalisée auprès de nouveaux clients s’avère un processus constant. La programmatrice n’hésite pas pour se rendre dans les salles pour parler avec le public, propageant un sentiment familier. Un contact privilégié qui compte surtout pour un art tel que la danse contemporaine ayant une certaine réputation d’hermétisme.
Mais malgré tous ces efforts de promotion soutenus, la compétitivité de lieux de divertissement à grande échelle comme le Centre Bell fait aussi ombrage et constitue une autre préoccupation.
Des pas qui bousculent
L’offre de la Rotonde et du Grand Théâtre de Québec met en scène plus de 250 interprètes qui brilleront jusqu’en mai 2024 à travers 18 créations de danse. Du classique féérique Casse-Noisette à Stations, chorégraphie solo originale griffée Louise Lecavalier s’intercale les cris d’espoir d’une relève bien en marche. Le cas Bordélique de Mélissa Martin. Et parce que la danse sait se souvenir de l’histoires des peuples, Danseurs du ciel, de la compagnie Mohawk L’A’nó:wara Dance Theatre, dirigée par Barbara Kaneratonni Diabo, rend hommage à l’âme des 33 travailleurs ayant perdu la vie en 1907 des suites de l’effondrement du Pont de Québec.
Enfin, pour ouvrir ce bal automnal, un OVNI de France : La Messe de l’âne d’Olivier de Sagazan. Un habitué du Québec, relate la directrice de la Rotonde, l’ayant découvert par le Festival Phénomena, rendez-vous interdisciplinaire d’artistes tout azimut. « Olivier on le connaît, la communauté de la danse au Québec l’aime. Il travaille avec l’argile et le kaolin, sur lui et les interprètes, pour créer des protubérances. Des images superbes qui tourmentent, parfois glauques, mais une création réellement originale, avec ses surprises qui bousculent… »