À peine un mois après nous avoir offert un pont entre l’Orient et l’Occident, voilà que Kiya Tabassian, de l’Ensemble Constantinople, nous présentait Traversées, le 30 août dernier, en l’Église Saint-Enfant Jésus du Mile End. C’est en compagnie d’un collègue de tous les jours, Patrick Graham (percussions), d’un complice de longue date, Ablaye Cissoko (kora) et d’un collaborateur surprise, Étienne Lafrance (contrebasse), que le maître de la musique persane nous en emmené faire une traversée entre le royaume mandingue et les cours persanes, entre le passé et le présent.
Les compostions sont toutes de notre ère et alternent entre les notes de Cissoko et celles de Tabassian alors que les paroles sont parfois modernes et parfois empruntées à des poètes anciens : Hâfez (1325-1389) et Amir Khosrow (1253-1325).
Comme à l’habitude, Kiya Tabassian s’adresse d’abord au public pour le mettre dans l’ambiance, dans la confidence. Il est appréciable que cette présentation ne soit faite qu’en français et cette fois, à l’aide d’un micro pour être compris de tous.
L’Ensemble Constantinople nous a habitués à des programmes riches et emplis de découvertes. Ce fut encore le cas ce soir-là. À l’écoute de la première pièce, Rêveries, que je n’avais jamais entendue, je me suis dit que je l’avais peut-être rêvée, justement, tant elle m’était familière.
Dans Maryama, Cissoko nous démontre à quel point la kora peut être mélodieuse. Dès ce deuxième morceau, la complicité entre Tabassian et Cissoko est évidente, tout autant que le plaisir qu’ils ont à partager leur musique.
La surprise de la soirée fut sans doute l’ajout de la contrebasse d’Étienne Lafrance, un ajout tout à fait pertinent qui est venu ajouter de la profondeur aux arrangements.
Dans certaines œuvres, par l’introduction d’accords très vigoureux, on pouvait imaginer, l’espace d’un instant, des accents de rock, eh oui! Cela était du plus bel effet. Aussi, à d’autres moments, la kora de Cissoko nous faisait goûter une saveur provenant davantage du Moyen-Orient que de l’Afrique de l’Ouest.
Et les découvertes ne s’arrêtent pas là. Parlons de Patrick Graham qui semble inventer de nouveaux sons à chaque prestation de l’ensemble. Il est impressionnant de créativité et de virtuosité. Virtuosité qui est tout aussi évidente dans le jeu d’Ablaye Cissoko, un magnifique jouer de kora mais aussi un chanteur à la voix emblématique.
Dans ce spectacle, aucune mise en scène, aucun décor, aucun jeu d’éclairage. Pourquoi y en aurait-il ? Tout était parfait, sans cela.