Affûtez votre pieu contre les vampires, ou préparez-vous à prendre vos jambes à votre cou: le cinéma d’horreur est à l’honneur, à la Cinémathèque québécoise, dans le cadre d’un hommage rendu à un genre presque aussi vieux que le septième art lui-même.
Depuis deux semaines, déjà, et jusqu’à la fin août, ce ne sont pas moins de 86 films qui seront projetés, pour le plus grand bonheur des amateurs de frissons en tous genres. « Au départ, quand on choisit un thème, ce dont il s’agit, c’est de proposer une espèce de regard transversal sur l’histoire et l’évolution du cinéma, à partir d’un point de vue particulier », mentionne au bout du fil Marcel Jean, le directeur général de l’institution sise au Quartier latin.
« La sélection se fait en fonction de la capacité de déclencher un sentiment de peur ou de dégoût chez le spectateur », a-t-il poursuivi, en évoquant tout d’abord l’histoire « pour montrer, par exemple, ce qui était horrifique à l’époque du cinéma muet, au début du 20e siècle, puis ensuite, de décliner ça sur le plan géographique – quels ont été les foyers de l’horreur ».
Dans le programme, on retrouve ainsi des films européens et occidentaux, mais aussi des films asiatiques, dont des oeuvres japonaises, sans surprise, mais aussi, évoque M. Jean, « un film indonésien, par exemple ». « Nous voulons essayer de montrer comment cela se répartit sur l’ensemble du globe. »
L’équipe de la Cinémathèque a aussi voulu proposer une vaste gamme de sous-genres de l’horreur, allant des zombies au loups-garous, en passant par les films de body horror, les oeuvres ultra sanglantes, etc.
« En fonction de ces sous-genres, on décline les classiques, pour en arriver à faire un choix », a poursuivi M. Jean. Sans oublier les considérations pratiques, comme la disponibilité des copies, les droits à payer, ou encore « les films qui nous ont marqués personnellement, que ce soit moi, ou un autre membre de l’équipe ».
À titre d’exemple qui pourrait être considéré comme sortant de l’ordinaire, M. Jean évoque Baxter, un film français réalisé par Jérôme Boivin, coscénarisé avec Jacques Audiard et sorti en 1989, où l’on suit les traces d’un chien meurtrier, et dont les pensées, transmises en voix off, correspondent, si l’on veut, au genre de réflexions que pourrait avoir le meilleur ami de l’homme.
« C’est un film que nous avons mis là, même s’il n’est pas passé à la postérité. Ça sort de nulle part, il n’y a pas d’autre chose qui a suivi. Ce n’est pas Halloween… Mais c’est un film qui ne ressemble à rien, qui est tout à fait étonnant, et qui a une véritable portée philosophique. »
-Marcel Jean, directeur général de la Cinémathèque québécoise
En jetant un coup d’oeil à l’ensemble de la programmation, on constate que l’équipe de la Cinémathèque a voulu ratisser large. Aux côtés de très grands classiques, comme Dracula (celui avec Bela Lugosi), Nosferatu, ou encore des titres plus récents comme The Exorcist, The Amityville Horror, The Thing ou encore l’excellent Les Affamés, on trouve aussi des titres moyens, mais imaginatifs, comme Slaxx, sans oublier des films marquants comme Titane, The Mist, Insidious, et bien d’autres.
Un genre pour tous
Faut-il vivre d’horreur et d’eau fraîche pour avoir un avis sur la programmation d’un tel cycle? « Je ne suis pas un total geek de films d’horreur, mais j’aime beaucoup le cinéma de genre, j’aime beaucoup le cinéma d’horreur, et j’ai fait mes devoirs; j’ai vu mes classiques. Et il y a ceux que je préfère et que je revois régulièrement », explique M. Jean
« Ce qui est intéressant, avec l’horreur, c’est qu’il y a des gens, au départ, qui me disent « moi, je n’aime pas le cinéma d’horreur », mais ils aiment Hitchcock; dans le cycle, il y a deux Hitchcock. Ils n’aiment pas le cinéma d’horreur, mais s’intéressent beaucoup à Michael Haneke; Michael Haneke, quand il fait Funny Games, c’est un film d’horreur. Tu as beaucoup de gens qui diront ne pas aimer l’horreur, mais ils aiment Kubrick, ils aiment Kaneto Shindo, ils aiment quantité de cinéastes qui ont fait des films d’horreur. Et cela, je trouve que c’est typique d’un genre qui a mauvaise presse, parce que c’est perçu comme un genre pour adolescents, la consommation rapide et la production rapide, ce qui est en partie vraie, mais il y a énormément de grands créateurs qui font de l’horreur. »
Et si le Festival Fantasia, qui débute jeudi le 20 juillet, présente lui aussi, quantité de films de genre (c’est l’idée derrière l’événement, après tout), y compris un bon nombre de films d’horreur, la Cinémathèque et l’organisation du festival n’ont aucune intention de se marcher sur les pieds, bien au contraire.
En fait, rappelle Marcel Jean, des projections de films sont prévues à la Cinémathèque, dans le cadre de Fantasia. Les amateurs d’horreur en auront plutôt pour leur creuse dent. Que celle-ci soit une canine servant à aspirer le sang, ou pas.