Un parent serait paniqué si son enfant avalait une batterie. Mais des chercheurs italiens viennent d’en créer une qui est conçue spécifiquement pour être ingérée.
L’intention n’est pas de révolutionner l’art culinaire. L’objectif est médical. En fait, il existe un authentique domaine de recherche appelé, faute d’un meilleur terme, « appareils électroniques mangeables » (en anglais, edible electronics) qui tente de produire des appareils exclusivement à partir d’ingrédients qui font partie d’un régime alimentaire normal ou d’additifs alimentaires.
En théorie, de tels appareils pourraient servir à diagnostiquer des troubles gastro-intestinaux sans avoir à introduire une sonde. Ils pourraient aussi servir à analyser la qualité des (vrais) aliments ingérés. Quelques percées ont été signalées ces dernières années. Par exemple, une équipe californienne a conçu en 2017 un « détecteur électrochimique » capable de détecter certaines molécules précises (acide urique, acide ascorbique, acétaminophène). Une équipe de quatre institutions de Chine et des États-Unis, en 2017, et une autre d’Italie en 2022, ont développé des appareils capables de communiquer entre eux.
La faisabilité d’appareils « mangeables » n’est donc plus à démontrer. Mais la difficulté jusqu’ici a été leur source d’énergie : sans batterie, ils ont une durée de vie trop limitée pour être médicalement plus utiles que les techniques dites invasives, comme les sondes utilisées pour une colonoscopie.
Selon les chercheurs de l’Institut italien de technologie, qui ont publié leurs résultats en mars dans Advanced Materials, leur batterie fonctionne à 0,65 volt, ce qui est trop faible pour créer des problèmes dans le corps humain. Elle utilise de la riboflavine (vitamine B2, qu’on trouve dans certains types de champignons) à titre d’anode (un des deux « pôles » d’une batterie) et de la quercétine (un antioxydant qu’on trouve entre autres dans les câpres) comme cathode. Le séparateur, qui maintient anodes et cathodes à distance afin de prévenir un court-circuit, est fait d’algues utilisées notamment dans les sushis. L’électricité générée peut alimenter un micro-appareil entre 12 minutes et un peu plus d’une heure, tout dépendant de la demande en énergie.
Ce ne serait pas suffisant pour faire rouler une voiture électrique, ironise dans le communiqué le co-auteur Ivan Ilic. Mais « c’est la preuve que des batteries peuvent être faites de matériaux plus sécuritaires que les actuelles batteries lithium-ion » et qu’il pourrait s’agir d’une piste à explorer pour les futurs ingénieurs.