Après avoir collaboré ensemble sur la série Alter, Philippe Pelaez et Laval Ng unissent de nouveau leurs forces pour adapter en bande dessinée un poème épique du seizième siècle avec Furioso, un sombre récit de fantasy incorporant plusieurs éléments de la légende arthurienne.
Réputé être le meilleur chevalier du monde, Garalt a été tué par Roland, le neveu du roi Kaarl, lors d’un combat singulier, et ses cendres ont été dispersées aux quatre vents. Bien qu’il soit mort il y a maintenant huit hivers, il revient un beau jour dans le monde des vivants sans savoir à quoi ou à qui il doit sa résurrection. Dans le premier tome de Furioso, le revenant, qui se fait désormais appeler Onfroi de Malemort, s’inscrit à la Grande Joute, un tournoi se déroulant au palais royal. Il y affronte une femme qu’il a jadis aimée, Bradamante, et apprend qu’il a un fils, né après son trépas.
Dans le second tome, Agramant, l’empereur des morts, s’apprête à attaquer Ys, la cité royale, avec l’aide de la fée Morgane. Quant à lui, Garalt découvre enfin pourquoi il est revenu de l’Outre-Monde, et devra décider à laquelle des factions il prêtera allégeance lors de ce conflit sanglant, qui risque d’embraser le royaume entier.
Le scénariste Philippe Pelaez s’est inspiré d’un poème du seizième siècle, Roland furieux d’Arioste, pour créer la bande dessinée Furioso. Il prend toutefois certaines libertés notables avec cette adaptation.
Par exemple, alors que ce sont les Maures qui menacent le royaume dans l’œuvre originale, ici, ce sont carrément les morts qui assiègent les cités. Le résultat est donc de la fantasy sombre, teintée de nudité, de violence et de magie, qui évoque une sorte de croisement entre la légende arthurienne (dont on retrouve certains personnages, comme la fée Morgane ou Merlin l’enchanteur, rebaptisé ici Myrddin) et l’univers de Conan.
Le scénariste explore également la notion de l’amour dans les romans de chevalerie, et sa dualité. Alors que Roland se transforme en homme sanguinaire et sans pitié après qu’une femme aie repoussé ses avances amoureuses, Garalt quant à lui ressuscitera grâce à l’amour que lui porte une magicienne.
Avec son coup de crayon fin et ses illustrations riches et foisonnantes où des dizaines de lignes s’enchevêtrent pour créer des ombres et des textures, Laval Ng reprend l’imagerie classique de la fantasy dans Furioso, mais il apporte sa propre touche personnelle à un style souvent exploité, et même si l’histoire est captivante, c’est la partie visuelle que j’ai préférée dans cette bande dessinée. Héros chevauchant un hippogriffe (un croisement entre un aigle géant et un cheval), monstre marin digne d’une créature lovecraftienne, cités antiques peuplées d’êtres fantasmagoriques ou champs de bataille fumant aux cadavres calcinés, les illustrations sont à la fois grandioses et inspirées. Le premier tome se termine par un cahier de croquis, ainsi qu’une postface de Théa Picquet, professeur à l’Université d’Aix-Marseille, qui examine les différences entre le poème original d’Arioste et la bande dessinée.
Grâce à sa fantasy sombre contenant davantage de zones grises qu’un sempiternel combat opposant les forces du bien à celles du Mal, Furioso réussit à remettre au goût du jour le poème héroïque d’Arioste, et les histoires de chevalerie.
Furioso – Tome 1 : Garalt est revenu, de Philippe Pelaez et Laval NG. Publié aux éditions Drakoo, 56 pages.
Furioso – Tome 2 : L’Outre-Monde, de Philippe Pelaez et Laval NG. Publié aux éditions Drakoo, 48 pages.
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