L’éclatement de la pandémie, en mars 2020, a forcé les institutions culturelles à revoir leurs pratiques, faute de pouvoir accueillir des spectateurs. Et si certains théâtre se sont tournés vers la diffusion en ligne pour éviter un arrêt complet de leurs activités, le bilan de ce genre de démarches est, au mieux, en demi-teinte.
Selon un rapport publié plus tôt cette semaine par Duceppe, l’un des grands théâtres de la région montréalaise, en collaboration avec Théâtres associés Inc (TAI), une entreprise qui a contribué à mettre sur pied ce système de diffusion de spectacles, si l’on considère uniquement l’intérêt du public, alors l’expérience a été un succès.
TAI précise ainsi que plusieurs salles ont eu l’occasion, grâce à ce nouveau système, d’effectuer leurs premières captations et diffusions en ligne; plus de 35 000 visionnements de différentes pièces ont eu lieu depuis les début du programme, en 2020, nous indique-t-on.
De ce nombre, plus du tiers (37 % ) est attribuable à des spectateurs se trouvant à plus de 25 kilomètres du théâtre; il est donc possible d’imaginer que ces spectateurs n’auraient pas eu l’habitude, avant la pandémie, de franchir cette distance pour aller assister à un spectacle.
Mieux encore, 45 % des clients en virtuel n’avaient pas fréquenté de théâtre au cours des deux saisons précédant la pandémie, lit-on encore dans le rapport. Et le risque que les théâtres ne se cannibalisent les uns les autres est aussi très minime, puisque « 85 % du public virtuel n’a consulté l’offre en ligne que d’un seul théâtre ».
Là où le bât blesse, cependant, c’est du côté de la rentabilité, admettent les auteurs du rapport. Car offrir une diffusion en ligne n’est pas de tout repos : non seulement faut-il s’équiper avec des caméras, des micros et des systèmes permettant d’accommoder plusieurs centaines de personnes à la fois pour une diffusion en ligne, parfois en direct, mais il n’était pas aussi possible d’exiger le même prix que pour un spectacle en salle.
« Pour les spectacles de théâtre conçus pour la scène, la production de captations de qualité cinématographique génère des dépenses supplémentaires disproportionnées, pouvant aller jusqu’à 50 % du coût de la production scénique », révèle-t-on dans le document.
Et en conservant un prix accessible pour les visionnements en ligne, c’est-à-dire 17 $, en moyenne, alors que les billets en salle peuvent coûter jusqu’à une cinquantaine, voire une soixantaine de dollars dans certains cas, les théâtres se retrouvent devant un précipice financier, puisque « le coût de production d’un projet virtuel est presque 12 fois le prix de vente du billet virtuel ».
Pour boucler les fins de mois, il faudrait ainsi que le volume de vente de ces billets soit « de trois à dix fois » plus élevé, une impossibilité pour l’instant, puisque « les théâtres n’ont pas les ressources nécessaires pour soutenir les efforts de promotion sur un large territoire et une longue fenêtre de diffusion, ni pour assurer la découvrabilité de leurs contenus dans un environnement où la concurrence des plateformes de streaming est féroce », écrivent les auteurs du rapport.
Il faut donc, disent-ils, continuer à bâtir le modèle d’affaires, puisque si l’intérêt du public est là, les assises financières, elles, sont absentes. Nul doute que les théâtres devront réfléchir à la poursuite de cette expérience en virtuel, en plus de faire possiblement appel aux différents paliers de gouvernement pour tenter d’obtenir du financement.
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