Il peut sembler incroyable de devoir le rappeler, mais le sexisme, c’est mal; et s’il peut être intéressant de déconstruire des codes sociétaux en place depuis malheureusement trop longtemps, encore faut-il savoir doser et offrir un espace de réflexion. Malheureusement, la pièce Beau gars, d’Erin Shields, se contente du service minimum.
Jouée au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, Beau gars commence avant même le lever du rideau : un bel homme, interprété par Gabriel Lemire, joue les potiches, ou encore le morceau de viande, installé dans ce qui pourrait ressembler à un présentoir. Le comédien, aux traits taillés à la serpe et musclé, porte qui plus est des vêtements particulièrement moulants; tout au long de la pièce, lesdits vêtements seront d’ailleurs de moins en moins nombreux, jusqu’à en arriver à une sorte de pagne.
Mais si ce beau gars est en quelque sorte une décoration, l’attention se porte plutôt sur trois amies, trois femmes particulièrement exubérantes (Oumy Dembele, Marie Bernier et Cynthia Wu-Maheux) qui passeront la première heure du spectacle à parler, de façon particulièrement avilissante, d’hommes relégués aux seconds rôles dans qui un film, qui une série télé, ou encore qui un spectacle de marionnettes.
Ainsi, pendant que les femmes sont policières, politiciennes, voire même monarques, les hommes, eux, ne sont bons qu’à tenir la maison en ordre ou à servir d’objets sexuels.
Dès les premières minutes de la pièce, ou plutôt dès la lecture du synopsis, le ton est donné : on veut casser les codes masculinistes, renverser des millénaires de sexisme, etc. En soi, la chose n’est pas mauvaise, tant s’en faut. Mais il faut aussi proposer une manière de faire qui fonctionne : remplacer simplement du sexisme par un autre, eh bien, cela reste du sexisme. On pourra sourire, voire rire à quelques occasions devant le côté absurdement excessif de la chose, il n’en reste pas moins que le processus demeure le même pendant une heure, condamnant les spectateurs à un premier degré fort décevant.
Et ce n’est pas la deuxième partie, où Gabriel Lemire nous narre l’histoire d’une femme s’interrogeant sur l’éternel sujet de la place réservée aux femmes dans la société, selon si elles sont bien habillées et maquillées – ou non –, qui permettra de sauver les meubles. Oh, l’acteur joue bien, cela est indéniable; mais au-delà de cette performance, et du fait que l’on inverse encore les rôles traditionnels, Beau gars n’apporte rien de nouveau, et l’on ressort du théâtre en se demandant si l’autrice voulait véritablement faire avancer le débat, ou simplement tenter de jeter un pavé dans la mare.
Beau gars, une pièce d’Erin Shields traduite par Olivier Sylvestre et mise en scène par Guillermina Kerwin; avec Oumy Dembele, Marie Bernier et Cynthia Wu-Maheux; présentée au Centre du Théàtre d’Aujourd’hui jusqu’au 1er avril
Abonnez-vous à notre infolettre tentaculaire
Encouragez-nous pour le prix d’un café
À l’occasion du mois de la francophonie, l’équipe de Pieuvre.ca tient à souligner son attachement à la qualité de la langue française. Voilà pourquoi nous utilisons quotidiennement Antidote pour réviser nos textes.