Des chercheurs ont identifié deux intervalles de temps au cours desquelles l’état des glaces et des océans aurait été favorable pour que s’accomplissent les premières migrations humaines entre l’Asie et l’Amérique du Nord, à la fin de la dernière ère glaciaire.
Ces travaux ont été publiés dans Proceedings of the National Academy of Sciences.
Les conclusions s’ajoutent à un nombre croissant de preuves selon lesquelles le trajet le plus probable, pour les premiers Américains, passait par la côte pacifique du continent, trajet qui pouvait être emprunté avant que les glaciers recouvrant le Canada et plusieurs parties des États-Unis commencent à reculer.
En utilisant des données de modélisation océanique et des informations provenant de carottes sédimentaires recueillies dans le nord-est du Pacifique, les chercheurs ont constaté la présence de deux intervalles climatiques pendant lesquels une combinaison de glace océanique hivernale et de conditions estivales libres de glace a sans doute facilité une migration plus au sud, vers la fin du plus récent âge glaciaire, affirme Alan Mix, océanographe et paléoclimatologue à l’Université d’État de l’Oregon et coauteur de l’étude.
« Nos travaux indiquent qu’au cours de cette période, la glace située le long de la côte ouest de l’Amérique du Nord, entre Seattle et l’Alaska, progressait et reculait de façon importante », mentionne M. Mix.
« De façon surprenante, il y a eu des périodes où la glace ne bloquait pas vraiment le chemin de ces premiers peuples. En fait, une partie de la glace pourrait avoir facilité la migration. »
Les premiers Américains ont occupé des parties de la Béringie, une masse territoriale se trouvant dans ce qui est aujourd’hui le détroit de Béring, et qui avait créé un pont entre l’Asie et l’Amérique du Nord. La question de savoir quand et comment les premiers occupants du continent se sont rendus sur celui-ci fait l’objet d’études et de travaux de recherche depuis des décennies.
Une théorie remise en doute
La majorité des preuves liées à l’arrivée des premiers Américains date de moins de 13 000 ans et pourraient avoir été laissées après un réchauffement du climat et le retrait de la calotte glaciaire épaisse de plus d’un kilomètre. Ces preuves ont mené à une théorie voulant que les Amériques ont été peuplées à l’aide d’un corridor créé lors du retrait des glaces.
Mais des informations plus récentes, notamment la découverte de pointes de projectiles vieilles de 15 700 ans, indiquent que les humains sont arrivés en Amérique bien avant l’ouverture de ce corridor libre de glaces.
« La multiplication des preuves pointant vers l’arrivée des humains avant l’ouverture du corridor libéré des glaces fait en sorte que la route côtière pourrait être le chemin le plus logique pour atteindre l’Amérique du Nord », a indiqué Summer Praetorius, le principal auteur de l’étude.
« Nous voulions déterminer comment les changements climatiques régionaux affectaient la viabilité de la route côtière à différents moments. Par exemple, comprendre à quel endroit et à quel moment la glace océanique s’est formée, dans le golfe de l’Alaska, et les implications qui y sont liées pour la façon dont les gens se sont déplacés le long de la côte, que ce soit à pied ou en bateau. »
Un modèle océanique à haute résolution démontre qu’à mesure que la glace commençait à se retirer, le processus avait fait en sorte que de grandes quantités d’eau douce s’étaient retrouvées dans l’océan. Cette eau de fonte a accéléré les courants océaniques se dirigeant vers le nord, ce qui aurait rendu les déplacements par bateau vers le sud, le long de la côte, entre les sections de terres émergées, plus difficiles.
Les carottes sédimentaires, qui offrent aux chercheurs des informations importantes à propos des conditions changeantes dans les océans et sur la terre ferme pendant de longues périodes de temps, ont démontré la présence de glace océanique à des intervalles clés, ce qui veut dire qu’il aurait pu être possible de traverser à pied entre les deux continents.
« La glace océanique est relativement plate et assez stable lorsqu’elle est accrochée à la rive, alors vous pouvez marcher dessus et chasser des phoques pour survivre pendant l’hiver », mentionne M. Praetorius.
« Il semble possible que la glace océanique puisse avoir facilité les mouvements, plutôt que de les avoir entravés, en offrant une surface plus facilement traversable que le chemin accidenté formé de glaciers criblés de crevasses, ou encore si l’on doit pagayer contre de forts courants. »