Si on se fie aux travailleurs de l’État de New York qui ont dû quitter temporairement leur emploi pour cause de COVID longue, 71 % ont nécessité un traitement médical pendant six mois ou ont dû s’absenter aussi longtemps. Plus d’un an après leur infection au coronavirus, 18% n’étaient toujours pas retournés au travail.
Ces données proviennent d’un rapport publié le 24 janvier par le Fonds d’assurance de l’État de New York, une agence gouvernementale financée par les cotisations des employeurs. Le rapport couvre les deux premières années de la pandémie, jusqu’au 31 mars 2022. Un peu plus de 3100 demandes déposées par des travailleurs correspondaient à la définition de COVID longue retenue par le Fonds.
Et il est possible que ces chiffres soient conservateurs, puisque certaines personnes ont pu ne pas pouvoir ou ne pas vouloir s’absenter, en dépit de leurs symptômes, ou n’ont pas demandé d’indemnités. En revanche, le rapport new-yorkais estime que les cas sont en décroissance en 2021 par rapport à 2020, résultat de la campagne de vaccination —comme le vaccin réduit les risques de cas graves, on présume qu’il réduit en même temps les risques d’infections conduisant à une COVID longue.
Reste qu’une grande partie des causes de la « COVID longue » sont encore obscures. Les symptômes varient d’une personne à l’autre, mais sont autant physiques (douleurs musculaires et articulaires, palpitations cardiaques, etc.) que neurologiques (allant d’une fatigue extrême à une perte du goût et de l’odorat). Les femmes sont plus à risque que les hommes. La communauté médicale continue de s’interroger sur ce qui rend certaines personnes susceptibles d’avoir des symptômes pendant plus d’un an, plutôt que quelques semaines.
Et ces données posent à nouveau la question du rôle, possiblement sous-estimé, de la COVID longue dans la crise de main-d’oeuvre qui frappe aux États-Unis et au Canada, entre autres. Il est en effet possible qu’un certain nombre d’hommes et de femmes que l’on a classés depuis deux ans dans la catégorie de ceux et celles qui ne veulent pas retourner au travail, sont simplement incapables d’y retourner à cause de ces symptômes.
De plus, contrairement à ce que certains ont évoqué ces deux dernières années, il ne s’agit pas de gens qui auraient été à l’âge de la retraite: parmi les 18% qui n’étaient toujours pas retournés au travail après un an, les trois quarts avaient moins de 60 ans.
Les nouveaux chiffres, lit-on dans le rapport, font de la COVID longue une cause peut-être importante de ce déficit de main-d’oeuvre et « présagent une réduction possible de la productivité, alors que les employeurs subissent la pression d’une population active de plus en plus souffrante ».
La question est de savoir si ce qui se passe dans l’État de New York correspond à ce qui se passe ailleurs dans le monde. Au Canada, un sondage mené en 2021 auprès de 1000 travailleurs diagnostiqués pour COVID longue, avait conclu que la moitié d’entre eux avaient dû réduire leurs heures. Dans un suivi effectué en 2022, plusieurs n’étaient toujours pas retournés au travail. Au Québec l’an dernier, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail rapportait avoir dû indemniser, entre mars 2020 et mai 2022, 662 travailleurs pendant au moins six mois, consécutifs ou non, pour « lésions professionnelles » causées par la COVID longue.