Dans le cadre du premier rapport sur les droits de la personne à l’échelle mondiale publié par le CIRIGHTS Data Project, le Canada et la Suède se classe en tête du palmarès de la protection de ces droits, avec une note de 96 (sur 100).
Ces deux pays sont suivis par la Nouvelle-Zélande, la Norvège et le Portugal, tous trois avec un « score » de 94. À l’opposé de cette liste, on trouve l’Irak (12), la Chine (10), ainsi que la Corée du Nord et la Syrie, tous deux avec une note d’à peine 6 points. Et tout en bas du classement, on retrouve l’Iran, où la violente répression des récentes manifestations – avec plusieurs emprisonnements et exécutions à la clé – fait en sorte que le régime des ayatollahs n’obtient que deux points.
Voilà plus de 40 ans que le professeur David Cingranelli, spécialiste de la science politique à l’Université de Binghampton, s’intéresse à la question des droits de la personne; le récent lancement du projet CIRIGHTS, une collaboration entre cette institution et l’Université du Rhode Island, permet d’atteindre un objectif à long terme, dit-il, c’est-à-dire la production d’une fiche claire et précise pour aborder des enjeux complexes.
Au dire des chercheurs qui ont participé à l’élaboration de ce premier classement, cette fiche vise à attirer l’attention, voire provoquer. Il s’agit, dit-on, d’une incitation à provoquer des changements.
« Les gens qui voient un classement comprennent ce que 95 veut dire, et ce que 20 veut dire », mentionne M. Cingranelli.
Selon celui-ci, le projet CIRIGHTS « permet d’obtenir une évaluation concise de ce qui se déroule dans les différents pays, en ce qui concerne la protection des droits de la personne ». On y trouve ainsi 72 notes chiffrées associées à la protection (ou à l’absence de) de divers droits reconnus à l’échelle internationale.
Les chercheurs souhaitent également ajouter des cartes, des données supplémentaires et des outils de visualisation, en plus d’un guide expliquant les notes attribuées. Ce rapport sera ensuite publié une fois l’an, et comprendra une note globale, ainsi que des classements spécifiques, notamment en matière d’égalité des genres, par exemple.
Au total, 25 droits ont été évalués selon des critères faisant l’objet d’un consensus selon diverses organisations internationales.
« Nos normes en matière de notation définissent tout ce que les chercheurs ont besoin de savoir – une définition simple du droit évalué, ses assises en matière de droit international, et des exemples de violations », indique ainsi Kate Sylvester, une étudiante qui a participé au projet. « Le but est d’être le plus objectifs possible. »
Parmi tous les pays évalués, cependant, on note un grand absent : les États-Unis. Au dire des responsables du projet de recherche, cela s’explique entre autres par un manque de données : si Amnistie internationale, qui a servi de base de référence pour évaluer le respect de plusieurs droits à l’échelle internationale, se penche sur le respect de l’intégrité physique au pays de l’Oncle Sam, l’organisation ne donne pas beaucoup plus de données.
De son côté, le département d’État américain s’intéresse à un bien plus grand nombre de droits à l’international, mais ne s’intéresse pas à ses propres citoyens.
Une autre raison expliquant cette absence est le fait que l’évaluation des pays est effectuée par des chercheurs installés aux États-Unis, et qui ont donc accès à un très grand nombre de sources à propos de leur propre pays. En gros, a expliqué M. Cingranelli, la situation équivaudrait à comparer des pommes et des oranges.
Tendances mondiales
En plus du classement individuel des nations, le rapport du projet CIRIGHTS pour 2022 identifie des tendances mondiales : selon les chercheurs, les droits économiques – à l’exception du droit à un salaire minimum – sont en recul, ainsi que les droits permettant de critiquer les gouvernements, en plus de l’autodétermination électorale et le droit à un appareil judiciaire indépendant.
Certains droits, cependant, auraient bénéficié d’une avancée, comme le droit à un procès juste et équitable, à la protection contre le trafic humain, les droits politiques des femmes, ainsi que la liberté de mouvement à l’intérieur et l’extérieur d’un pays.
Ultimement, indique le rapport, les pays peuvent être regroupés en deux catégories : ceux où les droits de la personne se sont améliorés avec le temps, et là où les droits ont fait du surplace. La principale différence tient au fait de tenir, ou non, des élections libres et régulières avec un suffrage universel pour les adultes, mentionne M. Cingranelli.
À plus long terme, l’équipe de recherche veut ajouter des données et s’intéresser à plus de pays. Le but ultime consisterait à fournir un ensemble de données englobant tous les droits de la personne reconnus à l’échelle internationale.
« Les droits de la personne deviennent réalité grâce à l’éducation », a encore indiqué M. Cingranelli. « J’espère que ces rapports seront utilisés partout sur la planète, y compris par des enseignants, afin d’apprendre des informations sur la protection et droit et évaluer la performance de leur propre gouvernement par rapport aux autres États. »