Après des débuts spectaculaires sur Webtoon, où elle a récolté plus de 300 millions de vues avant de devenir la série la plus populaire de la plateforme, Lore Olympus de Rachel Smythe passe du pixel à l’imprimé, avec deux premiers volumes publiés chez Hugo BD.
Ayant été élevée par sa mère Déméter dans le royaume des mortels, Coré Perséphone, l’héritière de la marque de céréales Mère d’Orge et la nouvelle déesse du Printemps, déménage pour la première fois dans le monde des Dieux, l’Olympe, afin d’y suivre des cours. Peu après son arrivée, elle se rend à une fête donnée pour l’anniversaire de Zeus en compagnie de sa colocataire, Artémis. Peu habituée à boire de l’alcool, elle tombe rapidement dans les pommes. Jalouse de sa grande beauté, Aphrodite demande à son fils Éros de transporter la jeune femme endormie dans la voiture d’Hadès. Ce n’est qu’une fois rendu à son domicile que le Roi de l’Enfer découvre l’occupante sur la banquette arrière. Il l’emmène donc cuver son vin chez lui, et l’installe dans la chambre d’ami. Perséphone se réveille le lendemain matin dans un lit inconnu, et fait la connaissance d’Hadès. Bien que tout oppose ces deux divinités, dont l’une a éternellement dix-neuf ans et l’autre plus de 2000 ans, c’est le coup de foudre instantané.
Véritable succès planétaire, la série Lore Olympus propose une réécriture d’une des légendes les plus connues de la mythologie grecque, soit l’histoire d’amour entre Perséphone, déesse du Printemps, et Hadès, le souverain de l’enfer. Bien que ce récit à l’eau de rose vise principalement les adolescentes et les jeunes femmes et que je ne sois vraiment pas le public cible, j’ai tout de même apprécié la façon dont la scénariste et dessinatrice Rachel Smythe transpose Poséidon, Héra, Hermès, Apollon, Hélios, Cronos, Hestia, Hécate, Thanatos et les autres divinités de l’Olympe de l’antiquité à notre époque contemporaine. L’album contient plusieurs réinventions originales. Le journal des Dieux par exemple s’appelle L’Oracle. Contrairement aux stéréotypes habituels, la version de l’Enfer présentée ici possède un climat froid, et il y fait toujours nuit. À l’entrée des lieux, on aperçoit un panneau routier sur lequel est écrit « Félicitations, vous êtes mort ».
Tandis que le premier tome de Lore Olympus prend le temps d’introduire le riche univers de la série, en plus de raconter la rencontre initiale entre ces deux êtres que tout sépare, l’intrigue avance à pas de tortue dans le second volume, qui se contente de présenter le flirt entre les deux, et les nombreux obstacles s’opposant à leur union, parmi lesquels les paparazzis, les avances insistantes d’Apollon envers Perséphone s’apparentant à du harcèlement, ou la jalousie de Menthé, une nymphe écarlate et l’ex d’Hadès. Il s’agit d’une cour qu’on ne peut certainement pas qualifier de précipitée puisque, après un bon 750 pages, les deux tourtereaux n’auront même pas échangé un simple baiser. Le récit repose principalement sur des têtes parlantes, et à l’exception d’une brève scène où Perséphone se retrouve perdue dans le Tartare, le lieu où les plus grands criminels subissent leur punition, il n’y a que très peu d’action.
Si son sens du rythme en termes de narration laisse parfois à désirer, Rachel Smythe excelle par contre au niveau des illustrations. Ses dessins charmants, très stylisés, sont posés sur des arrière-plans qui semblent peints à la main, et laissent parfois transparaître la texture du canevas. Elle a une façon inventive d’interpréter les cerbères, les centaures et les autres créatures mythologiques, et sa coloration crée une ambiance unique, avec ses Dieux à la peau bleue, verte, jaune, rouge ou rose. En plus de posséder de grands yeux de biche, ses personnages féminins sont pulpeux, et souvent érotisés. Avec sa petite robe blanche moulante portée lors de l’anniversaire de Zeus par exemple, Perséphone ressemble beaucoup à l’actrice Anita Eckberg dans le film La Dolce Vita, tandis qu’Hadès est représenté comme un homme chic et distingué. Les compositions graphiques de Lore Olympus sont intéressantes et créatives, et ses cases flottent souvent au milieu de grandes surfaces blanches, sans occuper toute la page.
Réactualisant une légende ancienne pour en faire une histoire d’amour résolument moderne, il n’est pas étonnant que Lore Olympus soit devenu un phénomène culturel, puisqu’il fait rêver les jeunes femmes de romance, tout en dépoussiérant au passage la mythologie grecque.
Lore Olympus – Volume 1, de Rachel Smythe. Publié aux éditions Hugo BD, 378 pages.
Lore Olympus – Volume 2, de Rachel Smythe. Publié aux éditions Hugo BD, 368 pages.