Les événements climatiques extrêmes ont beau se multiplier, depuis quelques années, ce n’est pas une sécheresse ou une inondation qui poussera les dirigeants à changer d’avis, révèle une nouvelle étude réalisée par des chercheurs de l’Université Concordia.
Ces travaux, effectués par Sam Rowan, professeur adjoint de science politique, démontrent que si les catastrophes environnementales ont été particulièrement nombreuses, en 2022, cela n’a pas encore provoqué de « virage » dans les politiques de lutte contre les changements climatiques.
Et pourtant, il y aurait eu matière à croire qu’avec un plus grand nombre de catastrophes, le discours politique pourrait changer. Après tout, comme l’indique le Pr Rowan, « chaque phénomène météorologique extrême provoquait un flot de débats et d’articles d’opinion de plus en plus virulents pressant les gouvernements à agir contre le réchauffement climatique mondial ».
« Il y avait lieu de penser que les vagues de chaleur ou les incendies de forêt déclencheraient des réformes, explique-t-il. D’abord, ces phénomènes rendent la question des changements climatiques beaucoup plus concrète pour les personnes touchées. Ensuite, les études montrent que les phénomènes météorologiques extrêmes, à l’échelle locale, provoquent un changement d’attitude envers les changements climatiques au sein de la population. Enfin, ils sont extrêmement dommageables pour l’économie. Il serait donc logique que les gens d’affaires pressent les autorités locales à agir », a-t-il ajouté.
En examinant un échantillon des chocs climatiques et des catastrophes naturelles survenues entre 1990 et 2018, le chercheur a pourtant constaté qu’il n’en était rien. Et que, justement, il n’existait aucune preuve de réformes politiques importantes, entreprises à l’échelle locale ou régionale, nationale ou internationale, au cours des trois années suivant l’une de ces catastrophes.
Non seulement, lit-on dans une note d’information publiée par l’Université Concordia, ne trouve-t-on pas de traces de réformes ambitieuses, qui pourraient nécessiter plus de temps à mettre en place, mais il n’y a pas, non plus, de preuves de l’entrée en vigueur de changements relativement simples à appliquer, comme l’octroi de financements pour combattre les effets des changements climatiques.
Un autre examen n’a pas, non plus, permis d’établir si les élus adoptaient davantage de politiques après une catastrophe. Et lorsque de nouvelles mesures sont effectivement mises de l’avant, leur contenu n’a aucun lien avec le climat.
Le professeur n’a toutefois pas examiné d’éventuels changements en matière de mobilisation de la société civile, dans la foulée de catastrophes climatiques. Idem pour de possibles gestes posés par des militants, ou encore des entreprises.
Et même dans les cas où l’on constate qu’il existe bel et bien une mobilisation, des groupes influents et aux poches profondes, comme l’industrie des combustibles fossiles, ont souvent les moyens de contrer ces appels à l’action.
« Pendant longtemps, cette industrie était mieux organisée et pouvait parler d’une seule voix. Avec cette étude, j’espère que les phénomènes météorologiques extrêmes deviendront une sorte de catalyseur pour aider les groupes environnementalistes à mieux s’organiser, à attirer de nouveaux membres et à former des coalitions plus solides pour faire avancer l’action contre les changements climatiques », conclut le Pr Rowan.