Impossible de reprocher à King Gizzard and the Lizard Wizard de manquer d’imagination; avec cinq albums au compteur pour la seule année 2022, dont trois sortis en octobre, la discographie de nos musiciens australiens favoris continuer de prendre de l’expansion à vitesse grand V. Ce qui manquait, toutefois, c’était une meilleure structure. Et heureusement, Changes répond amplement aux attentes.
De la structure, oui; on a beau aimer The Dripping Tap et ses 18 minutes, ou encore les albums Timeland et Laminated Denim, ou même la séance de jam qu’est Planets, Ice, Death, etc., force est d’admettre qu’à un certain moment, même si l’on aime les longues, voire les très longues chansons, on finit par faire le tour de la chose.
D’autant plus qu’à l’exception d’une poignée de pièces – y compris Timeland – la totalité de la production musicale de KGLW, cette année, s’articule autour d’un rock un peu déjanté, à moitié relax, à moitié psychédélique. Ce qui n’est aucunement une mauvaise chose, certes, mais cela devient légèrement répétitif.
Ironiquement, ce nouvel album Changes commence par… une piste de 13 minutes. On pourrait penser que le groupe propose seulement la troisième partie d’un genre de mégadisque comptant plusieurs heures de jams, mais à l’instar du nom de cette première pièce, Change, l’album est ici à la fois un peu de la même chose, mais aussi une proposition musicale différente.
Que trouve-t-on de différent, au juste? Après tout, les influences musicales habituelles sont largement présentes, avec le rock léger de Hate Dancin’, ou encore une bonne partie des arrangements de Change. Mais cette fois, pas question de se laisser aller complètement et d’accoucher du fleuve de 15 minutes, ou encore de proposer quelque chose d’ironiquement non ironique, comme la bien mièvre pièce Mycellium. Non, cette fois, miracle, on atteint « à peine » les 40 minutes au compteur. À croire que oui, il est possible d’offrir un disque complet en moins d’une heure. De là à dire que nous sommes presque à l’opposé du spectre d’un album comme Nonagon Infinity, qui ne se termine jamais, il y a un pas que nous pouvons franchir.
Et chaque piste de ce Changes semble avoir été minutieusement écrite, composée et interprétée pour en tirer toute la substantive moelle. C’est parfois doux, c’est parfois plus rock, c’est parfois même électro et jazzé, surtout avec la fantastique Gondii… Bref, c’est un plaisir à écouter. Et comme on en a pour moins de trois quarts d’heure, ce voyage musical peut s’effectuer deux, trois, quatre fois d’affilée. Alors que pour Omnium Gatherum, ou encore d’autres albums aussi disparates et remplis, on a possiblement besoin d’une marche.
Est-ce à dire que l’on aime vraiment tout de ce Changes? Même après plusieurs écoutes, on doute encore de la partie rap sur la première pièce. Mais cette partie est très, très largement compensée par la section férocement rock, qui suit, quelques minutes plus tard.
Autrement, ce nouvel album marquerait de fort belle façon l’année 2022 pour le groupe. Le temps de plancher sur de nouvelles propositions pour 2023. Peut-être le retour du thrash metal, qui sait? Ou un véritable plongeon dans l’électronique? Avec King Gizzard and the Lizard Wizard, les seules limites sont celles de notre imagination.