Les photos de la sonde spatiale DART, juste avant qu’elle ne percute son astéroïde, ont impressionné. Et même s’il ne s’agissait que d’une petite sonde percutant un petit astéroïde, les astronomes rivés derrière leurs télescopes, à 11 millions de kilomètres de là, ont également été impressionnés.
La première image est venue lundi, quelques heures à peine après l’impact, du projet ATLAS, un télescope en Afrique du Sud. On y voit, littéralement, une explosion: alors que l’astéroïde Didymos passe dans le champ de l’image, se produit ce qui ressemble à un énorme éclat de lumière : c’est l’impact.
Didymos n’est pourtant même pas le lieu de l’impact. Cet astéroïde d’environ 800 mètres de large est accompagné d’une lune, Dimorphos, qui était la cible de DART. Faisant à peine 160 mètres de large, cette lune est trop petite pour être vue sur l’image. Mais la violence de l’impact a été suffisante pour produire un nuage de débris —et c’est ce qui donne cet éclat de lumière: en quelques minutes, la brillance a été multipliée par 10, résultat des rayons du soleil qui se reflètent sur les débris. Le télescope prenait une photo toutes les 40 secondes.
ATLAS, qui signifie Asteroid Terrestrial-impact Last Alert System, n’était pas pointé sur cette région du ciel par hasard. Il fait partie d’un réseau de quatre télescopes à travers le monde qui observent le ciel à la recherche de nouveaux astéroïdes susceptibles d’entrer en collision avec la Terre.
Mais même pour ces experts de la chose, la taille du nuage de débris était une surprise, rapporte le New York Times: « nous ne nous attendions pas à voir sortir une aussi grosse colonne de poussière », explique l’astronome John Tonry, de l’université d’Hawaii, et co-directeur d’ATLAS. « En une heure, ce nuage était aussi gros que la Terre. » Les astronomes s’attendent à ce que les débris mettent quelques semaines à retomber sur Dimorphos.
D’autres images arrivées d’autres télescopes de l’hémisphère Sud sont moins spectaculaires mais le simple fait d’avoir vu quelque chose, à cette distance, témoigne de la force de l’impact. Par exemple, un autre télescope sud-africain (South African Astronomical Observatory, ou SAAO) a capté le même éclat lumineux. Le projet italien Virtual Telescope a publié une séquence d’images similaire.
En direct de l’espace
Une série différente d’images est toutefois venue de l’espace et elle est, elle, directement liée à la mission DART. Il s’agit de la petite sonde italienne LICIACube, qui fait à peine la taille d’une boîte à chaussures, et dont la mission était de suivre DART. Son point de vue sur le nuage de débris est donc plus détaillé: ses photos le montrent asymétrique, ce qui pourrait s’expliquer par l’angle avec lequel DART s’est écrasé ou par la morphologie du sol.
D’autres photos sont aussi venues de l’espace, mais plus près de la Terre: les télescopes James-Webb et Hubble. Ce n’était pas évident pour le premier, qui n’est pas conçu pour détecter des objets en mouvement. Mais dans son cas, il est possible que ses instruments permettent d’en apprendre plus sur la composition chimique de l’astéroïde.
Quant à Hubble, il avait la malchance d’avoir la Terre entre Dimorphos et lui au moment de l’impact, mais il a pris des photos ensuite, montrant le nuage de débris en expansion.
En théorie, toutes ces données sur la colonne ou le panache de poussières devraient permettre d’en apprendre davantage sur la structure et la composition de Dimorphos. Mais ultimement, c’est l’impact qu’aura cette collision sur l’orbite de cette « lune » autour de son astéroïde — 11 heures et 55 minutes pour l’instant — qui reste la raison d’être de la mission. Un changement, si petit soit-il, pourrait révéler quelle force serait nécessaire pour détourner de sa trajectoire vers nous un astéroïde — si jamais une telle opération s’avère un jour nécessaire.