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La Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles (Table) a profité de la période électorale pour questionner toutes les formations politiques en regard des revendications de la campagne CA$$$H (Communautaire autonome en santé et services sociaux – Haussez le financement !) .
Elle leur a demandé ce qu’elles feraient pour assurer le respect de l’autonomie des 3000 organismes communautaires autonomes du domaine de la santé et des services sociaux (OCASSS), pour augmenter leurs subventions de base et pour mettre fin aux iniquités administratives et financières du Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC). La Table a aussi demandé aux partis leurs intentions quant à l’indexation annuelle des subventions, tant en regard de sa méthode de calcul qu’au sujet d’une enveloppe exceptionnelle permettant de combler l’écart entre l’indexation versée et l’inflation des derniers mois.
De toutes les réponses reçues, celles de la CAQ sont les plus décevantes, ce pourquoi nous les détaillons ici. La déception fut d’autant plus grande que s’il y a un parti qui connaît bien les revendications des OCASSS, c’est bien celui qui a formé le gouvernement ces 4 dernières années.
Pas de promesse d’augmentation véritable des subventions
De toutes les formes de financement attribuées par le ministère de la Santé et des Services sociaux, le financement à la mission globale est le seul qui assure la pérennité des organismes puisqu’il est le seul à couvrir les coûts de fonctionnement réguliers (loyers, assurances, salaires, etc.). Dans sa réponse, la CAQ réitère avoir haussé de 127 M$ le financement annuel du PSOC à la mission globale durant son dernier mandat, ce qui n’équivaut qu’à 32 M$ par année en moyenne, alors que le besoin est de 370 M$ par année. Rappelons que lors du dernier budget, la CAQ a annoncé l’ajout de seulement 37,1 M$ pour 2022, qu’elle n’a prévu que l’ajout de 3 M$ l’année suivante, et rien d’autre jusqu’en 2026. Nous ne pouvons que constater le grand décalage entre ces montants et les déclarations de ce parti, qui reconnaît que les organismes communautaires « apportent une contribution originale et essentielle qui justifie le soutien de l’État [1]».
Qui plus est, alors qu’on la questionnait sur les sommes requises au PSOC, la CAQ a procédé à un raccourci trompeur en soulignant avoir ajouté 1,1 G$ pour mettre en œuvre le Plan d’action gouvernemental en action communautaire 2022-2027 (PAGAC). D’une part, seulement 17% de cette enveloppe sont destinés aux 3000 OCASSS, eux qui représentent 75% des organismes à financer. D’autre part, en décortiquant le montant, on découvre qu’à terme, ce ne sont que 311 M$ qui auront été ajoutés aux enveloppes actuelles des programmes, dont les 40,1 M$ pour le PSOC.
Considérant que l’enveloppe à la mission globale du PSOC ne représente qu’1% du budget annuel du MSSS, les OCASSS s’attendaient à un engagement électoral substantiel, d’autant plus que le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, monsieur Lionel Carmant, a plusieurs fois fait miroiter que son gouvernement ajouterait des sommes aux annonces du budget de 2022. Les questions posées par la campagne CA$$$H offraient une belle occasion d’annoncer une promesse ambitieuse, mais la CAQ ne l’a pas saisie.
Pas de promesse d’indexation suffisante pour éviter l’appauvrissement
Les OCASSS ont été particulièrement déçus de recevoir une indexation de leur subvention de seulement 2.9% au moment où l’inflation avoisinait les 8 %. Par l’indexation inadéquate des subventions, qui ne couvre pas la hausse des coûts de fonctionnement, le gouvernement appauvrit les groupes. Or, lorsqu’interrogée au sujet d’un réajustement en raison de l’inflation fulgurante, la CAQ répond à côté de la question en rappelant les fonds d’urgence qu’elle a versés en raison de la pandémie, ce qui n’est évidemment pas la même chose. Il est inquiétant que la CAQ refuse de tenir compte des réalités des groupes qui, par exemple, doivent respecter les contrats des travailleuses et des travailleurs, sans compromettre leurs activités.
Une vision utilisatrice des organismes
N’ayant pas obtenu de réponse quant à la manière d’assurer le respect de l’autonomie des organismes communautaires, la Table et la campagne CA$$$H se sont tournées vers la plateforme électorale de la CAQ pour y découvrir que les rares mentions des organismes communautaires illustrent une vision utilisatrice de ceux-ci, par des citations telles que « Un gouvernement de la CAQ entend (…) développer des partenariats avec le secteur privé et les organismes communautaires pour donner encore plus de soins et de services aux Québécois [2]». On souhaite rappeler à la CAQ que les OCASSS ne sont ni des sous-traitants du réseau, ni des dispensateurs de soins et de services. Les OCASSS sont les résultats de la mobilisation de leurs communautés. Ils sont des espaces de participation civique centrés sur les besoins de celles-ci, les rendant d’autant plus agiles à y répondre. Ils doivent être vus comme les joyaux qu’ils représentent et leur spécificité doit être protégée.
La Table et ses membres invitent la CAQ à revoir les réponses qu’elle a données aux questions de la campagne CA$$$H. Répondre favorablement aux demandes des 3000 OCASSS démontrerait le souci de la CAQ pour le bien-être de la population.
Gaëlle Fedida
Présidente de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles
[1] Cadre de gestion ministériel du Programme de soutien aux organismes communautaires pour le mode de financement en soutien à la mission globale https://publications.msss.gouv.qc.ca/msss/fichiers/2020/20-823-02W.pdf (page 1)
[2] Plateforme électorale de la Coalition avenir Québec 2022 https://coalitionavenirquebec.org/wp-content/uploads/2022/09/17-sept-caq-plateforme-coalition-avenir-quebec-2022.pdf (page 29)
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