Entre triomphe et piété, c’est le titre du concert donné à la Salle Bourgie du Musée des Beaux-arts de Montréal, ce vendredi 30 septembre par l’Ensemble clavecin en concert, sous la direction du chef français Hervé Niquet. Les solistes invités étaient les deux dessus, Myriam Leblanc et Catherine St-Arnaud, le haute-contre Philippe Gagné, la taille Aldéo Jean et la basse Dominique Côté.
La félicité, elle, n’était pas inscrite sur le programme mais c’est bien elle qui était au programme lors de cette soirée entièrement consacrée à l’œuvre du compositeur français Marc-Antoine Charpentier.
Par ou commencer? Le choix du programme, les chanteurs, les musiciens, le chef ? D’accord, le programme. Il paraît que c’est la faute à Luc Beauséjour, dixit Hervé Niquet, si nous avons eu droit à une soirée tout Charpentier. Un premier merci pour ce choix de programme si rafraîchissant, si différent. Avec l’omniprésence des compositeurs baroques italiens ou allemands dans nos salles, il fait du bien de découvrir un peu mieux les œuvres de Charpentier qui sont, au demeurant, fort nombreuses. En prime, le public a eu droit à une des toutes premières interprétations du Grand motet Miserere mei, Deus pour 2 dessus, haute-contre, taille, basse, chœur, 2 flûtes-à-bec, cordes et basse continue H. 219.
Les autres œuvres au programme étaient le Grand motet Beatus vir qui timet Dominum pour 2 flûtes-à-bec, 2 hautbois, basson, cordes et basse continue H208; Deux airs pour trompettes, timbales, 2 flûtes-è-bec, 2 hautbois, basson, cordes et basse continue H. 547 et le Grand motet Te Deum pour 2 dessus, haute-contre, taille, basse, chœur, 2 trompettes, timbales, 2 flûtes à bec, 2 hautbois, basson, cordes et basse continue H.146.
Rappelons-nous maintenant avec ravissement les performances des chanteurs. De Philippe Gagné, mentionnons la très grande expressivité et la sensibilité indéniable. D’Aldéo Jean, retenons l’intensité mais aussi le caractère particulier de sa voix qui n’est pas sans rappeler celle d’un Dominique Visse, lui aussi un adepte de Charpentier. Dominique Côté, quant à lui, il a réjoui l’auditoire par sa palette de couleurs très étendue et sa maîtrise vocale aussi précise dans les passages marqués piano que dans ceux marqués fortissimo.
De Catherine St-Arnaud, disons qu’elle a bien fait mais la part belle de la partition étant allée à Myriam Leblanc, il était difficile pour sa consœur de se démarquer.
Quant à Myriam Leblanc, il faut bien se rendre à l’évidence qu’elle rejoint maintenant Suzie Le Blanc au firmament des sopranos baroques : que du pur bonheur !
Une des particularités de Marc-Antoine Charpentier c’est son immense talent pour harmoniser toutes les voix et tous les instruments. Ce partage équitable des différentes parties permet à chaque musicien d’être mis en valeur. Et quand vous réunissez sur scène les Luc Beauséjour, Olivier Brault, Amanda Keesmaat et Vincent Lauzer, pour ne nommer que ceux-là, il ne faut pas s’étonner d’obtenir un résultat ravissant. Surtout si tout ce beau monde est dirigé, guidé, accompagné, transporté par l’ineffable Hervé Niquet!
Le charismatique maestro savoure visiblement chaque seconde de sa soirée et ce plaisir est contagieux et contamine toute la salle. Vivement une prochaine visite de ce grand musicien.