Deux des quatre roches martiennes analysées depuis juillet par la sonde américaine Perseverance contiennent « probablement » du « matériel organique ». Ce n’est pas de la vie: mais ça fait monter le niveau d’enthousiasme des chercheurs.
D’une part, l’endroit qu’explore actuellement Perseverance est le fond de l’ancien delta d’une rivière, se jetant dans un lac qui est aujourd’hui le cratère Jezero. D’autre part, trouver du matériel organique dans deux échantillons de roches sur les quatre analysés, témoigne que le robot roule sur un bon filon. Ces roches sont vieilles de quelques milliards d’années, à une époque où, croit-on, Mars était beaucoup plus hospitalière.
« Ce sont deux des plus importants échantillons que nous récolterons dans cette mission », a déclaré en conférence de presse David L. Schuster, de l’Université de Californie, un des experts en géologie au sein de l’équipe Perseverance.
Lui et d’autres experts ont toutefois bien pris soin de souligner que molécules organiques n’est pas synonyme de vie. Des processus purement chimiques peuvent expliquer leur présence dans ces roches. Mais il s’agit précisément du type de « signature » que recherchent les biologistes.
L’équipement à bord de Perseverance ne permet pas d’aller plus loin et d’apporter la preuve définitive. Pour cela, il faudra attendre que ces roches aient été rapatriées sur Terre —puisque Perseverance n’est que la première phase d’une longue mission. Il doit récolter un nombre suffisant d’échantillons jugés intéressants (12 jusqu’ici), en laisser certains derrière lui dans des tubes de métal que, dans la prochaine décennie, une nouvelle sonde (Mars Sample Return) viendra ramasser et ramener sur Terre. Celle-ci, une collaboration des agences spatiales européenne et américaine, doit en théorie partir en 2028.
Arrivé sur la planète rouge en février 2021, Perseverance —en compagnie de son « hélicoptère » Ingenuity— a passé sa première année à explorer le « fond » du cratère, avant de se diriger vers ce que les planétologues considéraient être son véritable objectif: le lit d’un delta asséché. La sonde avait d’ailleurs atterri plus loin que prévu de ce delta, ce qui explique le temps qu’il a fallu pour l’atteindre: elle y est finalement arrivée en avril dernier. Logiquement, le flot d’un cours d’eau devrait avoir laissé dans son delta un plus grand nombre de roches sédimentaires et de débris provenant de plusieurs lieux en amont.
Une des deux roches est ce que les géologues appellent un grès, qui est le fruit de l’agrégation de grains surtout sableux. L’autre roche est une « mudstone », une roche sédimentaire composée à l’origine de boue ou d’argile. Si, comme on le suppose, elle s’est formée alors que le lac s’évaporait, elle pourrait avoir gardé des traces de vie microbienne, à supposer qu’une telle chose ait existé il y a 3 milliards d’années.
Des signes de matériel organique avaient été trouvés auparavant dans le cratère, mais en quantités beaucoup moins encourageantes qu’ici. « Les signaux étaient présents presque à chaque point de chaque balayage », a ajouté l’experte de l’instrument qui a effectué cette analyse (Scanning Habitable Environments with Raman & Luminescence for Organics & Chemicals), Sunanda Sharma.