On est en septembre, et le Groenland continue de fondre. C’est l’avertissement inquiet qu’avait lancé au début du mois le glaciologue américain Jason Box, depuis son poste d’observation sur la banquise, alors que la pluie se mettait à tomber.
En temps normal en effet, l’été prend fin là-bas dès le mois d’août, et septembre est le moment où les glaces d’hiver recommencent à se former. Pas cette fois : à partir du 3 septembre, plusieurs journées consécutives de pluie ont accéléré la fonte d’une partie de la calotte glaciaire qui recouvre cette île-continent. Une fonte qui, au final, s’est mesurée en dizaines de milliards de tonnes de glace: il s’agirait de la plus importante fonte survenue en septembre, depuis 40 ans que de telles données sont récoltées. Et certaines stations météorologiques ont enregistré, entre le 3 et le 6 septembre, leurs températures les plus élevées, non pas de septembre, mais de l’année.
Le coupable immédiat : un courant d’air chaud venu du sud, au-dessus de la mer de Baffin et de l’ouest du Groenland.
Ce n’est évidemment pas la première fois dans l’histoire récente que les glaciologues s’inquiètent de voir apparaître de nouveaux records. Mais le constat cette année intervient deux semaines après une étude sur les « points de bascule » —ces seuils au-delà desquels certains des systèmes terrestres risquent de s’effondrer. L’un des systèmes identifiés dans l’étude, parue dans la revue Science, est la calotte glaciaire du Groenland: à un moment donné, écrivent les chercheurs, vraisemblablement lorsque l’augmentation de la température moyenne de notre planète aura dépassé le seuil des 1,5 degré Celsius, la fonte de cette calotte glaciaire deviendra irréversible. Au rythme où vont les choses, ce seuil pourrait être atteint peu après 2030.
Il faut se rappeler que lorsqu’on parle d’une augmentation de la température moyenne de notre planète de 1,5 degré depuis l’époque industrielle, au Groenland en revanche, l’augmentation est plutôt de 3 degrés. Et l’anomalie du début de septembre variait entre 10 et 17 degrés au-dessus de la moyenne des années 1979 à 2000, selon le groupe Climate Reanalyzer, de l’Université du Maine.