Une entité lovecraftienne, dieu-monstre d’un autre monde aux yeux multiples et aux tentacules menaçants, manigance pour envahir le royaume. Mais il ne s’agit pas ici de votre pire ennemi. Non. Votre pire ennemi, dans Legends of Kingdom Rush, est bien plus insidieux, bien plus insurmontable. Ce terrible ennemi, c’est le générateur de nombres aléatoires, communément appelé RNG.
Le cinquième titre de la série Kingdom Rush s’éloigne du « tower defense », un genre que la licence a contribué à remettre au goût du jour, pour s’aventurer du côté des jeux de rôle tactiques aux combats ancrés dans la tradition de Donjons et Dragons. D’abord sorti sur Apple Arcade en juin 2021, le RPG d’Ironhide Game Studio débarque maintenant sur PC via Steam, où il aspire à se mesurer aux Baldur’s Gate et aux XCOM de ce monde.
Legends of Kingdom Rush offre au joueur la possibilité d’incarner un petit groupe de héros aux aptitudes complémentaires, choisis avant chaque mission dans une liste relativement garnie, mais qu’il faudra déverrouiller progressivement au fil de l’aventure. Certains de ces héros sont d’agiles roublards, d’autres sont des jeteurs de sorts, alors qu’une troisième catégorie regroupe les « tanks », prêts à croiser le fer au corps à corps et bénéficiant de précieux points d’armure. Chaque héros a des compétences uniques, ce qui permet plusieurs combinaisons intéressantes.
Au cours de ces missions, vos héros gagnent de l’expérience au fil des escarmouches et montent de niveau pour débloquer des compétences et accroitre leurs points de vie. Ils perdent toutefois ces niveaux entre chaque mission, mais progressent tout de même en « rang », ce qui leur permet de déverrouiller des compétences différentes. Ce système de progression permet de varier les plaisirs et d’utiliser toute une panoplie de héros sans trop ralentir leur progression individuelle, mais contribue au plus grand défaut de Legends of Kingdom Rush : la fragilité des héros.
Un jeu aléatoire
En conséquence, l’issue des combats dépend souvent des jets de dé. Avec un minimum de chance et des choix tactiques décents, vous pourrez terrasser un boss de mission et ses sbires sans même leur donner l’occasion de vous frapper une seule fois… pour ensuite voir votre groupe se faire massacrer par le premier ennemi venu de la mission suivante, trois fois de suite.
La plupart de vos héros, outre les tanks, peuvent être tués d’un seul coup par la plupart des ennemis, surtout en début de mission. Mais même ces fameux tanks, lorsque malchanceux, peuvent ne pas survivre plus d’un ou deux tours. Vous pouvez, vous aussi, éliminer plusieurs de vos cibles en un seul tour… ou les voir survivre à deux ou trois attaques, au gré de vos jets de dés virtuels.
Legends of Kingdom Rush accentue dramatiquement ce défaut avec son système de progression, mais aussi par le fait que les jets de dés ne s’appliquent pas aux chances de toucher. Aucune attaque, aucun sort, ne rate sa cible à moins qu’une aptitude défensive ne vienne à son secours. Conséquemment, l’issue d’un combat se décide généralement dès les deux premiers tours.
Dans le cadre de ce test, 15 des 20 premiers combats de l’aventure ont été des victoires faciles, quatre autres ont été des défaites cuisantes à sens unique, et un seul a fait figure d’exception en offrant un niveau de difficulté adéquatement dosé pour une victoire aussi satisfaisante que coûteuse en points de vie.
L’échec n’est pas dramatique et certains gains sont conservés à la manière d’un « rogue-like » pour faciliter légèrement les tentatives suivantes (la mort du groupe entier oblige simplement à recommencer la mission du début), mais le tout peut être particulièrement frustrant lorsqu’on a l’impression que nos choix tactiques n’y sont pas pour grand-chose.
En outre, c’est rarement l’intelligence artificielle des ennemis qui assurera leur victoire, puisqu’ils sont très prévisibles. La plupart du temps, ils se contentent de foncer dans le tas.
Legends of Kingdom Rush déborde de références à la pop culture qui agrémentent un univers somme toute générique et un scénario qui contient plus de clins d’œils que d’idées novatrices, mais qui est adéquatement livré. On y plonge dans une ambiance à mi-chemin entre la bande dessinée et le jeu mobile (forcément, puisqu’il en est un à l’origine) dont parvient à se dégager un certain charme.
Le jeu bénéficie aussi d’une traduction française tout à fait décente, très québécoise dans le choix des expressions, mais partielle, car certains éléments restent affichés en anglais.
Dans le créneau des jeux de rôle tactiques, où la compétition ne manque pas, Legends of Kingdom Rush ne se démarque, finalement, pas vraiment du jeu indépendant moyen.
L’éventail de héros et de compétences est assez varié et le système de combat assez bien pensé pour rendre l’expérience plutôt agréable… lorsqu’elle ne se transforme pas en partie de « rollies ». Mais quand c’est le cas – et ça l’est trop régulièrement – le dieu-dé gâche une carrière d’aventurier aussi rapidement qu’une flèche dans le genou.
Legends of Kingdom Rush
Développeur et éditeur : Ironhide Game Studio
Plateformes : iOS (Apple Arcade) et Windows (testé sur Steam)
Jeu partiellement disponible en français