Les robots, l’intelligence artificielle et d’autres technologies d’automatisation permettent aux entreprises de produire davantage. Cela provoque aussi des pertes d’emploi, ce qui entraîne de graves problèmes pour ceux qui n’ont pas d’autres formations et qui sont financièrement vulnérables. Une étude effectuée par des chercheurs de l’Université Darmouth et du MIT soutient ainsi que la vitesse de l’automatisation est excessive et devrait être réduite de moitié.
« Les entreprises ne tiennent pas nécessairement compte des conséquences de l’automatisation sur leurs employés. Elles ont plutôt tendance à se concentrer sur la valeur ajoutée de l’automatisation pour la compagnie et ses actionnaires », affirme le coauteur de l’étude, Nathan Zrozi.
« L’automatisation peut être avantageuse pour l’ensemble de la société. Mais elle a aussi un coût à court terme. Cela affecte négativement des travailleurs qui peuvent être financièrement vulnérable. Le gouvernement devrait taxer l’automatisation pour ralentir son adoption, tandis que les employés affectés obtiennent une nouvelle formation et transitionnent vers de nouveaux postes. »
Et comment utiliserait-on l’argent de cette taxe? L’étude ne s’y intéresse pas, mais M. Zorzi juge que « l’argent de cette taxe pourrait être employé pour payer les nouvelles formations ou compenser les travailleurs affectés à l’aide de programmes d’aide ».
Selon les chercheurs, toutefois, il ne serait pas nécessairement de taxer éternellement l’automatisation. Dans environ 40 ans, le gouvernement peut cesser de taxer ce processus, alors que les employés touchés trouvent éventuellement un autre travail, ou quitte le marché de l’emploi pour prendre leur retraite. « L’automatisation ne devrait être taxée que pendant que les générations existantes s’ajustent », avance M. Zorzi. « Il n’y a pas de raison de taxer l’automatisation à long terme, si les nouvelles cohortes peuvent être formées adéquatement et choisir des emplois qui sont à moins à risque d’être remplacés par des machines. »
M. Zorzi et son coauteur, Martin Beraja, ont trouvé des manquements dans la littérature existante à propos des politiques optimales à propos de l’impact de l’automatisation sur les travailleurs affectés, et ont donc décidé de déterminer si le gouvernement devrait intervenir dans le processus d’automatisation et taxer l’adoption de ces technologies.
Plusieurs « frictions »
Les auteurs de l’étude reconnaissent que les travailleurs sont confrontés à deux « frictions », ou contraintes en pratique, lorsqu’ils sont affectés par l’automatisation. Tout d’abord, cela prend du temps pour effectuer une transition vers un nouvel emploi, ce qui signifie, potentiellement, de longues périodes de chômage ou de formation.
Deuxièmement, les travailleurs sont limités dans leur capacité d’emprunter par rapport à leurs futurs revenus, et pourraient subir une forte diminution de leur consommation (achats d’aliments, paiements pour se loger, frais de transport, etc.) s’ils sont affectés par l’automatisation.
Les deux auteurs démontrent que ces deux frictions rendent l’automatisation inefficace et excessive.
Pour déterminer l’ampleur du ralentissement nécessaire, l’équipe de chercheurs a développé un modèle quantitatif qui réplique essentiellement les dynamiques de l’automatisation et du déplacement des travailleurs aux États-Unis, depuis les années 1970. Cette époque a marqué le début d’un déclin long de nombreuses années en ce qui concerne le nombre de travailleurs dans divers emplois routiniers, comme les soudeurs, les opérateurs de machines, et les travailleurs de bureau, un phénomène largement alimenté par l’automatisation.
« Nos travaux démontrent, théoriquement et quantitativement, qu’il existe une justification pour ralentir la vitesse de l’automatisation », indique M. Beraja.
« Le gouvernement peut engranger de grands avantages pour l’économie en taxant l’automatisation et en réduisant sa vitesse de moitié. Cela donnera des travailleurs qui profiteront de meilleures conditions, et cette amélioration du bien-être des employés est comparable à une augmentation permanente de la consommation de l’ordre de 4 %. »
Aux États-Unis, le secteur manufacturier emploie à lui seul environ 12,8 millions de travailleurs. L’automatisation s’étend maintenant au-delà de la fabrication, et adopte des formes de plus en plus familières, comme le service à la clientèle, les caisses en libre-service, les logiciels pour remplir sa déclaration de revenus, les véhicules sans conducteur, et d’autres avancées.
Jusqu’à 49 % des employés payés de la planète pourraient éventuellement être automatisés. Comme l’expliquent les coauteurs de l’étude, une politique consistant à ralentir l’automatisation et à la taxer pourrait potentiellement aider à amortir le choc subi par de nombreux travailleurs qui seront éventuellement affectés par le phénomène.