À l’approche de la saison du jardinage, une lectrice nous avait posé la question suivante : est-il vrai que de semer à la pleine lune peut avoir un effet sur la croissance des plantes? Le Détecteur de rumeurs n’a pas eu besoin d’attendre quelques pleines lunes pour confirmer qu’il n’en est rien.
Depuis des millénaires, des peuples de différentes traditions ont travaillé la terre en suivant le calendrier lunaire. Plusieurs explications sont évoquées pour justifier ces pratiques, mais très peu d’études scientifiques sérieuses se sont penchées sur le sujet. Celles qui l’ont fait concluent que la Lune n’a aucune influence sur la croissance des plantes.
Explication 1 : les marées
La croyance la plus répandue est celle qui fait appel aux marées. Semer à la pleine ou à la nouvelle lune favoriserait la germination parce que, dit-on, l’eau remonterait davantage à la surface du sol (et/ou dans les plantes) sous l’effet de l’attraction lunaire plus forte. Un peu comme une marée, mais à petite échelle.
Le premier problème avec cette idée est que, bien qu’il soit vrai que les marées sont causées par l’action de la gravité de la Lune, elles ne sont observables que dans des étendues d’eau de grande taille. Sous l’influence de son satellite, la Terre se déforme légèrement et les océans se soulèvent. Mais on parle de poussées qui, à l’échelle de la planète, sont très faibles. Dans la Méditerranée, l’effet des marées se mesure en centimètres. À l’inverse, l’effet de la Lune est imperceptible sur les petites étendues d’eau, tout comme il est imperceptible dans notre corps, malgré toute l’eau qu’il contient… et à plus forte raison, sur les plantes.
De plus, si la Lune produisait vraiment sur les plantes le même effet que sur les marées, on remarquerait alors deux « poussées » par jour, et non deux par mois, comme le faisait remarquer en 2020 une équipe de recherche du Jardin botanique et de l’Université de Valence, en Espagne. Celle-ci avait alors calculé que l’effet de la Lune sur les plantes serait 10 millions de fois moindre que celui sur les océans.
Explication 2 : la lumière de la pleine lune
Le fait que la pleine lune reflète plus de lumière vers la Terre pourrait-il avoir un effet sur la croissance des semis ? Sachant qu’en plus, cette lumière réchauffe un peu l’atmosphère… quoique d’à peine 0,02 °C…
Il faut savoir que cette lumière réfléchie par la Lune est 400 000 fois plus faible que celle du Soleil, même durant les nuits de pleine lune. Il se trouve que c’est entre 5 et 50 fois trop peu pour faire germer ou fleurir des végétaux, et 10 000 fois trop peu pour la photosynthèse. Même dans les endroits où la pollution lumineuse nocturne est à son plus fort — donc une luminosité qui dépasse celle de la pleine lune — les niveaux de lumière sont trop bas pour la photosynthèse, avaient mesuré deux chercheurs en 2006.
À noter que cette explication contredit les nombreuses recommandations de jardinage en fonction du calendrier lunaire, puisqu’on recommande aussi de semer à la nouvelle lune qui, elle, ne réfléchit aucune lumière.
Explication 3 : le champ magnétique
Certains suggèrent que la croissance des plantes serait favorisée par l’influence du champ magnétique de la Lune. Les scientifiques espagnols cités plus haut défont également cet argument. Le champ magnétique de la Lune est 10 000 000 000 000 000 000 fois plus faible que celui de la Terre. Bref, non seulement on ignore si les plantes répondent au champ magnétique de la Terre, l’effet du champ magnétique de la Lune, s’il existe, est encore plus négligeable.
Au-delà de ces trois hypothèses, la Société nationale d’horticulture de France, qui s’est penchée en 2012 sur la question du jardinage « avec la Lune », a conclu elle aussi que « si la Lune a une influence sur la performance agronomique, elle est infinitésimale ». À tout prendre, « le rôle que jouent la qualité des sols, l’alimentation hydrique, la température, l’ensoleillement, le contrôle des ravageurs, est immensément plus important que celui du cycle lunaire ».
Verdict
Mieux vaut porter attention à l’arrosage, à l’ensoleillement et à la température que d’essayer de suivre le très complexe calendrier lunaire, si vous voulez donner de la vigueur à vos semis.